Darren Aronofsky nous livre avec Requiem for a dream une sorte de remake de Pi son précédents film.
Une descente aux enfers de personnages accroc à diverses drogues, la plongée dans l’univers complètement brumeux de personnages irresponsables et incurables. En adaptant Hubert Selby jr, Aronofsky a trouvé un support parfait à ses désires de mises en scènes paranoïaques. Plans serrés, montage rapide, quelques effets de styles parfaitement justifiés…. Aronofsky gomme les quelques défauts mineurs de son précédent film et arrive déjà à une maturité incroyable. Le film prend là encore aux tripes. Comme Pi, c’est un film que l’on ressent physiquement.
Harry, Marion et Tyron sont dépendants de l’héroïne. La route qu’ils empruntent est une voie toute tracée vers l’enfer. Pour cette héroïne, ils sont prêt à tout, y compris à voler leurs propre famille, à coucher avec un être qui les repousse, se prostituer même, ou à se mêler à des gens peu fréquentables.
Pour l’héroïne, Harry prive sa mère de son bien le plus précieux, Marion couche avec des truands capables de la priver de son existence au moindre faux pas.
Si l’été représentera pour eux le paradis artificiel par excellence, l’automne forgera une route toute tracée vers l’hiver, synonyme pour eux d’un enfer laborieux dont l’essence même nous est présentée de la manière la plus horrible qui soit, à savoir la plus réaliste.
Sara Goldfarb, elle, est un cas particulier parmi ce quatuor damné car contrairement à son fils et à ses proches , elle deviendra involontairement dépendante de la drogue qui viendra a bout de sa lucidité. Déjà dépendante à la télévision, qui représente le moteur de sa dépendance aux cachets, ainsi que le produit qui l’aura privé de sa personnalité ; elle sombrera petit à petit, et inconsciemment, dans un cauchemar dont la sortie sera à jamais fermée à clef.
Si Harry, Marion et Tyrone n’accepteront leur statut de junkie que lorsque celui-ci provoquera leur déchéance ; la pauvre Sara, elle en prend hélas conscience malgré elle à mi-chemin entre son paradis artificiel et son enfer réel.
Si Harry, Marion et Tyrone méritent le destin qui les guette – l’ayant volontairement provoqué – Sara, elle, n’a jamais voulu provoquer un tel cauchemar, ce qui fait d’elle la victime d’un système et prendre des cachets pour maigrir et resplendir à la télévision – ce monde qui n’existe pas – dans un show minable qui représente toute le processus d’assujettissement et de mise en dépendance des spectateurs.
De toute évidence, Darren Aronofsky à saisi dès la lecture du roman de Selby Jr la façon la plus saisissante qui soit de le mettre en image et en musique.
Il ne faut pas oublier Clint Mansell et le Kronos Quartet, dont les sons et les mélodies sont en parfaite symbiose avec les pénibles images et le tortueux montage d’Aronofsky.
Requiem for a Dream est un film organique et terrifiant. Il représente à ce jour le constat cinématographique le plus puissant portant sur la dépendance.
Reste que Requiem for a Dream est à déconseiller à toutes personnes voyant en le cinéma un simple moyen de prendre du bon temps et d’oublier son train-train quotidien, à l’image d’une Sara Goldfarb dont la télévision « positive » est un échappatoire à une existence douloureuse.