Amateur de sports extrêmes, Aron Ralston part un weekend en exploration du Blue Canyon dans le désert de l’Arizona. En bon sportif, il est équipé en excellent matos, a prévu de quoi éviter la fringale et est armé de tous les gadgets nécessaires au contrôle des risques pris dans son aventure. Il est seul au milieu de nulle part et s’éclate comme un gamin. Après une rencontre furtive avec deux jolies jeunes femmes, il va se retrouver malgré lui coincé au fond d’une petite faille. C’est là qu’il réalise sa seule erreur dans la préparation de son trip : il n’a prévenu personne du lieu ou il partait…
127 heures attire l’attention pour au moins une raison. Comment le film va t’il tenir le rythme d’une aventure solitaire, dans un espace réduit, et sur la durée du métrage ? Le film ne dure qu’1h20, ce qui constitue un premier indice. Il s’agit du film le plus court réalisé par Danny Boyle. Le cinéaste n’est par ailleurs pas le moins bon des réalisateurs-clippeurs et, pour le coup, son style et ses tics de mise en scène s’accordent parfaitement bien au sujet, à la culture des sports extrêmes etc. Danny Boyle va utiliser tous les artifices possibles pour qu’à aucun moment le spectateur n’ait le temps de trouver le temps long.
Il ne faut donc pas être allergique au style de Danny Boyle. S’il avait ce projet en tête avant la réalisation de Slumdog Millionaire, le film sort donc après ce dernier, qui lui a valu Oscars et reconnaissance. Les deux films n’ont a priori pas grand chose à voir et pourtant c’est au moins leurs cachets esthétiques, l’omniprésence des couleurs chaudes, et la narration contée sur le mode de l’urgence (avec des nuances fortes entre l’un et l’autre) que les films se ressemblent.
Les deux films sont aussi deux purs produits de consommation, et dans le cas de 127 heures, l’impression d’ensevelissement sous le business des marques est véritable. L’esthétique renvoie aux clips et émissions de MTV, les gadgets sont omniprésents (caméra, Ipod, etc.) , les placements de produits se trouvent un peu partout, et le film lui même est un pur produit de divertissement.
Cela va même au-delà. Toutes les échappatoires envisagés par Aron Ralston le conduisent systématiquement vers quelque chose, généralement un produit, en lien avec la consommation de masse (cf. la scène de la fête, ou la scène du souvenir de ce qu’il possède dans sa voiture)
Si Aron Ralston doit sa survie à la connaissance profonde de son sport et de son corps, il la doit aussi à son côté débrouillard. Il n’a là pas grand chose à envier à MacGyver. Tous deux ne seraient pas grand chose sans leurs couteaux suisses. On note d’ailleurs cette assertion de Aron critiquant son couteau de fabrication chinoise par rapport aux vrais couteaux suisses. C’est là une conséquence décevante de la mondialisation dans laquelle Aron et plus généralement le film baignent complètement.
Tout ceci ne retire absolument rien de l’efficacité du film. Danny Boyle fait preuve d’inventivité et 127 heures est un film haletant et qui fait impression. Si Aron Ralston est amateur de sensations fortes, Danny Boyle va lui nous en ménager quelques unes aussi.
Dans son premier tiers, le film est fun pour le côté aventureux de Aron Ralston, ses prises de risques, son apparente inconscience qui fait tant effet sur les deux filles avec qui il passe du temps quelques heures.
Ensuite, nombreuses vont être les scènes pouvant susciter malaise ou écoeurement chez le spectateurs. 127 heures est en effet un film physique, à tout point de vue, et la principale prouesse de Danny Boyle est de nous faire ressentir chaque sensation, douce autant que forte.
Danny Boyle insiste sur le sens sensitif qu’a son héros et arrive à nous le faire partager, qu’il s’agisse de caresser les parois d’une grotte ou de chercher à profiter de la chaleur d’un rayon de soleil.
La performance de James Franco est forte pour cela. Il n’y a pas que sa capacité à supporter seul le poids du film, il y a cet investissement physique et comment il arrive à nous faire ressentir petit à petit la dégradation de sa condition, sa déshydratation, ses blessures et ses douleurs. De fait, la tension monte crescendo. L’urgence se fait plus forte, la question de la survie laisse de moins en moins de place à une quelconque alternative. Danny Boyle prend soin de ne pas choquer, mais aborde quand même frontalement l’écueil physique de la solution. 127 heures n’est pas un film à suspens, c’est un film dans lequel la pression monte, de la même façon que même si on n’a pas de doute sur l’issue dans Titanic, on se laisse saisir par l’acharnement des personnages à vouloir survivre. 127 heures est lui un film qui implique presque l’investissement physique du spectateur. Et Danny Boyle réussit haut la main à nous maintenir en haleine.
Benoît Thevenin
127 heures – Note pour ce film :
Année de production : 2010
ok avec toi… Le montage et les plans magnifiques rattrappe une mise en scène trop tape à l’oeil (on se fout de voir le fond de la bouteille d’urine par exemple). Le personnage est un casse-cou égoïste et arrogant, apparemment rien à redire le vrai Aron Ralston l’était ! Au bord du gouffre chacun d’entre nous se remettrait en question en pesant à ceux qu’on aime… L’amputation n’est pas plus gore que la majorité des films et en plus Danny Boyle a l’intelligence de ne pas s’attarder sur le sujet. Saluons James Franco qui trouve là son meilleur rôle de sa jeune carrière. 3/4