Le Caïman n’est pas un film sur Berlusconi ! En fait, Moretti raconte l’histoire d’un producteur de séries Z et d’une jeune cinéaste qui se débattent pour monter le projet d’un film sur Berlusconi. Tout est dans la nuance. On peut sans doute voir par là les difficultés que Moretti lui-même à pu rencontrer pour réaliser son film.
Malgré la tragicomédie qui se joue en permanence dans ce film, l’aspect politique domine forcément tout. Le personnage de Berlusconi est décrypté autant via les situations imaginées par le cinéaste que par des images d’archives évidemment édifiantes.
Moretti est connu pour son engagement politique et il n’y a bien sûr que peu d’objectivité dans son propos. Le Caïman, c’est finalement un peu Tartuffe, une grande farce ou s’agite jusqu’à l’exubérance chacun des protagonistes du film.
Mais le film n’est pas strictement politique. Il parle aussi de cinéma et du rapport qu’entretien sans doute Moretti avec ce milieu parfois perçu comme réactionnaire.
Au final, tout dysfonctionne : la famille, le travail de cinéma et la politique. Moretti montre une Italie légère et immature, risée de l’Europe (cf. le rôle railleur du producteur polonais). Le personnage du producteur est quelqu’un de défait. Il ne produit plus rien et est en instance de divorce. Il lui faudra consommer sa rupture, l’officialiser devant un notaire, pour qu’il rebondisse enfin en tournant à nouveau.
Le Caïman est un film important car il dit beaucoup de choses sur l’Italie d’aujourd’hui. Cette Italie qui encaisse 30 années de Berlusconisme. Quoi que l’on pense de cet homme là, il a transformé son pays, il en est l’homme fort et on ne peut évoquer l’Italie sans lui accorder l’importance qui est la sienne.
Le film est bien sûr à prendre sur le ton de la satire. Et ce qui est le plus savoureux, en définitive, c’est de voir Moretti lui-même endosser le costume du Président du Conseil. On imagine le plaisir de Moretti à jouer ses scènes et le rictus de Berlusconi quand il verra ses images.
B.T
Le Caïman
Sortie française le 22 mai 2006