The Cell de Tarsem Singh (2000)

Le succès de Seven (David Fincher en 1995) remet au goût du jour l’intérêt pour le film de serial killer, quelque peu évaporé depuis la reconnaissance – jusqu’aux Oscars – de la qualité du Silence des agneaux (Demme, 1991).

Comme Fincher, Tarsem Singh a poli ses armes de cinéaste dans la pub et le clip. The Cell, son premier long-métrage, semble le point de jonction entre les deux films  pré-cités.

Comme dans Le Silence des agneaux, un tueur en série kidnappe des jeunes filles qu’il séquestre avant de les tuer selon son rituel à lui. Comme dans Le Silence des agneaux, une dernière victime, encore vivante et retenue dans un endroit difficile repérer, peut-être sauvée si la Police obtient les informations déterminantes à temps.

Dans le film de Demme, une jeune stagiaire du FBI rentre en contact avec un fameux tueur en série du nom de Hannibal Lecter. Leurs échanges finiront par servir l’enquête. Tarsem Singh innove lui dans sa manière de conduire les investigations de la Police. Là aussi il s’agit d’une jeune femme (Jennifer Lopez) qui a encore tout à prouver, mais elle est spécialiste dans un domaine très particulier, un procédé thérapeutique expérimental qui consiste à la faire rentrer littéralement à l’intérieur de la conscience d’un patient endormi. Le tueur dans The Cell étant arrêté chez lui dès le premier tiers du film, c’est dans les méandres de l’esprit torturé du criminel qu’elle va se plonger dans l’espoir de trouver les informations qui lui permettrons de localiser la dernière victime.

Ce procédé fournit à Tarsem l’opportunité de satisfaire ses obsessions esthétiques, son sens de l’image. Certaines images se retrouveront par exemple, à peu de variation près, dans son film suivant (The Fall en 2006), telles ces images dans un désert de dunes de sables (Cf. The Cell vs The Fall).

Cette image rappelle le clip, par Tarsem également, de Losing my Religion, de R.E.M (1991)

Tarsem nous invite surtout à l’exploration d’un esprit dangereux, ou le tueur laisse libre court à ses fantasmes les plus sadiques. On se croit alors embarqué dans une aventure morbide et effrayante, sauf que le film bascule plutôt dans le baroque et une relative surenchère esthétique. Au final, le film est beaucoup moins malsain et stressant que son modèle, Le Silence des agneaux donc, modèle du genre.

The Cell fait aussi beaucoup penser à Seven et l’impression parait très juste dès lors que l’on sait que les deux films partagent un même compositeur, Howard Shore. En l’occurrence, on retrouve véritablement une même ambiance, à certains moments du moins. Il faut par exemple mettre en regard la séquence dans The Cell ou la Police intervient pour arrêter le tueur et celle dans Seven ou David Mills et William Somerset trouvent  Victor, la victime du péché de la paresse. Le souvenir du film de Fincher est ravivé également là ou The Cell trouve son épilogue, au milieu d’un désert aussi sec que celui de la conclusion de Seven. Cela dit, là aussi, on doit dire que The Cell ne fait pas le poids face à son autre modèle.

Une image qui rappelle le final de Seven (1995)

Il faut dire que The Cell reste finalement très sage et son scénario, plutôt convenu et parfois parasité par des dialogues mièvres, ne rivalise pas avec la cruauté des évènements chez Fincher, dans un film qui aura marqué au fer nombre de spectateurs. The Cell ne joue clairement pas dans la même cour, mais il n’en demeure pas moins un film quelque peu singulier et qui exerce une véritable fascination, au moins pour son esthétique.

Dans le rôle de la psychologue chargée de rentrer dans l’esprit malade du serial killer, on retrouve Jennifer Lopez, alors actrice en vogue suite à ses prestations successives dans U-Turn (Oliver Stone, 1997) et Hors d’atteinte (Steven Soderbergh, 1998). L’intérêt qu’elle suscite tient surtout à son sex appeal, fiévreux dans U-Turn, plutôt qu’à son talent d’actrice. Elle est d’ailleurs assez peu convaincante dans The Cell. Peu importe, son succès au cinéma lui ouvre très vite les portes vers ce qui constitue son rêve véritable, la chanson. Elle sort un premier album en 1999, quelques mois avant la sortie en salle de The Cell, et privilégiera ensuite sa carrière musicale à celle d’actrice. On ne retient d’ailleurs pas grand chose de sa filmographie après The Cell, sinon un cumul de comédies romantiques insignifiantes tel Coup de foudre à Manhattan (2002), par exemple.

Quant à Tarsem Singh, il mettra un petit peu de temps avant de réaliser The Fall (2006), son second long-métrage tout à fait dans la lignée de The Cell, mais dans une toute autre ambiance, féérique et aventureuse, et où il affiche une maîtrise visuelle hors du commun. The Fall est présenté à Berlin mais ne sortira pas dans les salles française, ce qui est fort regrettable tant il méritait de grands écrans pour être pleinement admiré. Il est vrai que The Fall a été un four commercial aux Etats-Unis… Dommage, car ce cinéaste est talentueux et un des meilleurs produits de cette génération de vidéastes MTV éclose dans les 90’s. On espère donc qu’il remettra vite les pendules à l’heure, par exemple avec Les Immortels dont on aimerait bien qu’il mette la honte à 300 et au Choc des Titans, ce qui n’est pas du tout improbable. A voir.

Benoît Thevenin

The Cell ***

Sortie française le 18 octobre 2000

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