Comédie très bavarde et réjouissante, The Color wheel est, malgré son titre, un film tourné en 16 mm dans un noir et blanc granuleux, au charme désuet qui rappelle dans la forme au moins les films new-yorkais indépendants du début des années 90.
Alex Ross Perry, dont il s’agit du 2e long-métrage après l’inédit Impolex en 2009, se met en scène en compagnie de sa co-scénariste Carlen Altman dans un road trip à la conclusion implacable, quelque peu étonnante, en tout cas transgressive.
Carlen Altman joue le personnage d’une actrice très imbue d’elle même et de sa beauté mais qui, à force de ne rien faire et d’attendre que le téléphone sonne, n’obtient jamais aucun rôle. J.R est autant prétentieuse et arriviste que mesquine et méprisante. Après s’être faite larguée par son amant, un prof qui lui a promis monts et merveilles, elle cherche le soutient de son frère Colin (Alex Ross Perry) pour aller récupérer ses dernières affaires chez son ex. Colin est exactement l’inverse de sa soeur, un garçon au physique banal, au tempérament calme et qui a une vie bien rangée. Les deux sont commes deux couleurs opposées sur la roue chromatique (the color wheel) mais totalement complémentaires…
Pendant tout le film, Colin subit sans trop broncher les attaques répétées de sa soeur. Le mépris affiché et tel qu’il ne peut qu’être feint. Ces deux là s’adorent, c’est tout de même assez claire malgré les apparences. Ce couple improbable va passez son temps à se chamailler et rencontrer des personnages sur leur route qui tous autant qu’ils sont ne sont pas moins calculateurs et mesquins que ne l’est J.R. Que ce soit le réceptionniste d’un hôtel bigot qui improvise une pancarte pour les forcer à s’embrasser et prouver le mariage qui les lierait, que ce soit ces ex camarades de lycées qui les invitent à dessein à une fête, ce valide qui se fait passer pour handicapé pour paraitre intéressant le temps d’une soirée, l’amant qui a déjà remplacé l’étudiante avec qui il couchait par une autre étudiante etc., il n’y en a pas un pour rattraper le comportement odieux de J.R.
Les dialogues sont féroces, souvent humiliants et chacun en prend pour son grade. Comédie méchante, misanthropique même, The Color wheel détonne en même temps qu’il masque habilement une réalité étrange dont on ne peut même pas dire que sa révélation nous prenne tant que ça à revers. Il fallait quand même l’oser cette conclusion, et ça ne fait que renforcer la bonne impression d’ensemble que laisse ce film au charme tout à fait ambivalent, devant lequel on prend un malin plaisir et où l’on rit jaune.
Benoît Thevenin
Vu il y a deux heures au MK2 Beaubourg. Beaucoup beaucoup aimé. Drôle, féroce, sensible, bien conduit,belle musique, excellent sous-titrage. Les deux acteurs sont extra. Mon meilleur film depuis longtemps.