A l’origine, le film devait s’appeler « Les gens ne savent pas peut être ». Ce que l’on ne sait pas effectivement, c’est le motif de la dispute qui éclate dès les premières images du film…
Roland Edzard a finalement choisi de nommer son premier long-métrage La Fin du silence. Si on ne sait rien des personnages, et si cela manque probablement au spectateur qui a besoin d’un minimum d’informations pour prendre parti et/ou s’identifier aux personnages, on devine un ras le bol partagé qui explique ce titre. Le père ne supporte plus l’inertie de ce fils qu’il tire de son lit et chasse littéralement de la maison. Ce dernier, sans doute, ne peut plus encaisser les humiliations qu’il doit subir depuis un certain temps. En tout cas, quand le film commence, le conflit est déjà amorcé, et il n’y aura pas de place pour une quelconque conciliation.
Roland Edzard applique la recette de son court-métrage La Plaine, primé par la Cinéfondation à Cannes en 2005, ainsi qu’au festival Premiers Plans à Angers. Ce court commençait de la même manière, par une bagarre brutale, à même la terre et sous les yeux d’une famille impuissante.
La Plaine se déroulait en rase campagne et portait bien son titre. Cette fois le réalisateur déplace le conflit familial dans le cadre des monts vosgiens. On note la volonté du cinéaste de s’inscrire dans une topographie précise, de livrer un film physique, débarrassé en grande partie de toute psychologie. Roland Edzard cherche à coller au plus près de la terre, de livrer un film sec, viscéral sinon animal. Franck Falise dans la peau du fils banni donne l’impression d’une bête traquée et qui se débat pour sauver sa peau.
Le film pâtit cependant d’énormes lourdeurs, dans les rares dialogues, dans les incarnations bien trop marquées des personnages et même dans la mise en scène. On a beaucoup de mal à ressentir autre chose que du dégoût pour ces personnages. L’émotion ne prend pas, il n’y a jamais aucune compassion ni empathie à laquelle se raccrocher, seulement une haine qu’on explique pas vraiment et qui ne s’exprime seulement que par la brutalité et des cris. L’expérience du film, présenté en sélection à la Quinzaine des réalisateurs 2011, nous a été particulièrement pénible, écoeurés par ce trop plein de colère et de haine, par cette absence totale de compromission. Ce pourrait être une qualité, mais là, non. Roland Edzard prend le parti d’un film brut à tout point de vue : pas de découpage, une lumière naturelle, et des péripéties qui se succèdent mais sans conduite narrative véritable. Le film donne le sentiment de tourner en rond et, malgré sa courte durée, finit par nous épuiser complètement.
Benoît Thevenin
La Fin du silence
Sortie française le 7 décembre 2011