Million Dollar Baby de Clint Eastwood (2005)

Oscars 2005 / Meilleur film

Un entraîneur de Boxe passé à côté de sa vie, un secret enfouit derrière son masque, se retrouve confrontée à une jeune boxeuse pleine d’ambitions. Pour elle, la boxe est un échappatoire par rapport à sa difficile vie de serveuse dans un bar miteux. Elle est ambitieuse et cherche à s’attirer la sympathie du coach, pour qu’il l’entraîne, lui apprenne à devenir une championne. Lui, très carré dans ses idées, refuse d’abord… La boxe n’est pas un sport de fille… Mais parce qu’ils ont en commun ces blessures au cœurs, les deux vont se lier et jusqu’à tisser peu à peu une vraie relation père-fille…

Du croisement de ses deux destinées émerge une émotion toute droite contenue dans la réalisation sobre, tout en retenue, de Clint Eastwood. Cette relative austérité sied parfaitement à la dureté et au cloisonnement des vies dont les personnages sont les victimes. Les rapports entres chacun se dessinent peu à peu, dévoilant la sensibilité qui les caractérise. On sent les relations emplies de passion et, en même temps, totalement distendues.

Clint Eastwood prend tout le monde à contre-pieds à mi-chemin. Alors que le destin semble sourire enfin à la jeune femme, et par extension au coach, la fatalité vient interrompre leur envolée sublime. C’est là aussi que le film perd de sa puissance. Alors que jusque là, jusqu’à l’accident, Eastwood manifestait une certaine mélancolie douce, une forme de poésie, une subtilité infinie dans le portrait de ses âmes égarées, voilà que Million Dollar baby verse dans une forme de pathos assez inutile. Eastwood semble exercer un chantage à l’émotion en rajoutant des tonnes de détails sordides et futiles.

Cette conclusion à quelque chose de faux, de bancal dès lors que l’on garde en tête le souvenir d’un film aussi poignant et subtil que Mar Adentro d’Alejandro Amenabar, sortit quelques jours plus tôt. Ce final aurait pu être beau, mais il apparaît comme formaté pour la course aux Oscars, course remportée haut la main d’ailleurs. Bien sûr, avec le recul, il est facile de dire cela. En même temps, ce n’est pas incongru que de le penser. Cela paraît même évident.

Malgré tout, Million Dollar Baby est un vrai grand film. Il ne faut pas bouder son plaisir devant une œuvre aussi pleine d’humanité, d’optimisme et réalisé avec une telle pudeur et un tel soin formel. L’excès de compassion dans la dernière demi-heure raisonne cependant comme un bémol. Et il est légitime de rester sur sa faim…

Benoît Thevenin


Million Dollar Baby – Note pour ce film :
Sortie française le 23 mai 2005

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