Perfect sense de David Mackenzie (2011)

Réalisateur difficile à cerner, David Mackenzie navigue entre différent registres, du film noir (Young Adam, 2003) à la comédie adolescente (Toy boy, 2009) en passant par le drame social (My Names is Hallam Foe, 2007), avec tout de même une constante, une noirceur récurrente dans sa façon de peindre les relations humaines et sentimentales qui fait tout l’intérêt de son cinéma. Même Toy boy n’y échappe pas, qui distille un humour relativement acerbe et qui nuance considérablement l’apparente légèreté du sujet. Bref, David Mackenzie n’est pas le genre de cinéaste que l’on peut ranger dans une case.

Pour Perfect sense, le cinéaste retrouve Ewan McGregor, qu’il avait dirigé dans Young Adam. Le comédien britannique partage cette fois l’affiche avec Eva Green pour ce qui est, une fois encore chez Mackenzie, une histoire d’amour totalement atypique. Le pitch est prometteur, qui nous soumet à une étrange vision de la fin du monde. Une épidémie mondiale affecte les sens humains. Les personnes subissent d’abord de violentes crises avant de revenir à la réalité privés collectivement de l’un des cinq sens. Cette idée séduisante sur le papier est envisagée à travers le prisme d’un jeune couple. Ils se rencontrent, se séduisent, s’aiment, se disputent etc. Perfect sens prend ainsi les aspects d’une fable dans laquelle l’histoire sentimentale prend le pas sur le concept de science-fiction.

Ce concept est alléchant car il rentre a priori en contradiction avec ce que le cinéma sollicite comme sens. Le septième art requiert au moins la vue, mais aussi l’ouïe. Sans trop de surprise donc, les premières vagues de désensibilisation concerne le goût et l’odorat. Le toucher présente lui un challenge intermédiaire. C’est par le toucher entre les personnage dans le film que les histoires prennent corps. David Mackensie préfère cependant se concentrer sur l’histoire intime du couple Ewan McGregor-Eva Green. A l’instar de ses précédents films, il se plait à noircir la relation entre les deux. Les possibilités de mise en scène que suggèrent le pitch de départ sont en revanche niées. Mackensie ne se laisse pas aller à l’expérimentation, ça ne l’intéresse pas. Il s’applique seulement à filmer platement le déroulement de son histoire. A la fin, on se dit que le cinéaste a décidément une vision désespérée de l’amour, mais surtout, on ne peut s’empêcher de penser qu’il passe complètement à côté du potentiel de son sujet. Dans la forme comme dans le fond, Perfect sens est pauvre, et donc décevant. Et encore, on ne parle même pas des séquences de crises qui segmentent le récit, grotesques, et qui gâchent tout.

B.T

Perfect sense **1/2

Sortie française le 28 mars 2012

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