Jacques Audiard a trouvé dans Un Goût de rouille et d’os, le recueil de nouvelles de Craig Davidson, le même genre de personnages égarés et marginaux que dans ses précédents films. Là encore, il s’agit de la rencontre entre deux personnages meurtris et que tout oppose a priori. Stéphanie (Marion Cotillard) perd ses jambes lors d’un accident au centre aquatique où elle travaillait à dresser des Orques. Ali (Matthias Schoenaerts) est un père célibataire et irresponsable qui vivote de petits boulots et évolue presque toujours à la lisière de ce qui est permissible par la loi.
De rouille et d’os ne fait pas exception à côté des autres films d’Audiard. Il s’agit bien, d’abord, du portrait de deux âmes perdues qui se raccrochent l’une à l’autre. Il y a dans la relation entre Stéphanie et Ali le même genre de rapport fragile et ambigüe qu’entre Carla et Paul (Emmanuelle Devos et Vincent Cassel) dans Sur mes lèvres (2001).
Après son accident, Stéphanie plonge dans une légitime dépression. Elle s’enfonce dans la solitude et une forme de renoncement. Sa rencontre avec Ali va tout bouleverser car Ali est un garçon impulsif qui ne sait pas prendre de pincette. Il dit les choses toujours très franchement, avec le risque sans doute pas mesuré de blesser celle à qui il parle. Ali se révèle être exactement celui qu’il faut à Stéphanie pour qu’elle se réveille et reprenne possession de son corps et de ses moyens. Ali la bouscule, ne la juge jamais et prend soin d’elle comme il le ferait d’une valide. Jamais la question de son handicap n’intervient dans ses décisions. Probablement aide t’il Stéphanie simplement parce qu’il a compris qu’elle a besoin de lui.
Ali est pourtant un garçon irresponsable, qui s’occupe mal de son fils, laissé à l’attention de sa soeur (jouée par Corinne Masiero), et qui ne prend guère soin de lui même. Ali est aussi un combattant, un boxer/kickboxer qui va se laisser entrainer dans l’univers des combats illégaux. Il fait ça d’abord parce qu’il a besoin d’argent et qu’il ne peux guère compter que sur sa force pour s’en sortir. Ali a une capacité à encaisser les coups, à infliger à son corps une violence sèche et brutale, qui prouve la solidité de la carapace qu’il s’est forgé.
La force du cinéma d’Audiard est son refus de toute complaisance. Les personnages sont toujours dignes, y compris quand ils sont brisés où humiliés. Le cinéaste puise dans la noirceur des vies de ces personnages une infime lueur qui est la promesse de lendemains meilleurs. Le désespoir n’est jamais la fin. Audiard refuse d’accabler ces personnages, ou de leur trouver des excuses lorsqu’ils s’écroulent.
Le film laisse difficilement insensible. Certaines scènes sont très dures, éprouvantes même, mais toujours nécessaires. Comme souvent chez Audiard, rien ne dépasse dans la narration, avec un sens toujours très affuté de l’ellipse, et pas plus dans la mise en scène, ambitieuse et complètement maîtrisée. Le film contient quelques scènes qui risquent d’imprégner durablement les mémoires des cinéphiles, à commencer par cette séquence où Stéphanie se réveille et découvre qu’on lui a coupé les jambes. La fin est également sublime d’émotion, bouleversante mais qui sonne terriblement juste, et risque de marquer au fer rouge.
Benoît Thevenin
De rouille et d’os
Sortie française le 17 mai 2012
Excusez-moi, juste un petit message perso … Je suis assigné en justice pour un article du 02 octobre 2010 !… La réalisatrice du film « La rafle » m’attaque pour ma réaction à ses propos après la sortie de son film… Je remercie par avance pour vos commentaires sur l’article en question ; soutiens SVP pour étayer ma défense !… http://www.selenie.fr/article-rose-bosch-devrait-fermer-g-82372688.html
Enième chef d’oeuvre pour Audiard qui persiste et signe sa place de numéro 1 en France. 4/4
Franchement, le film bien, le style, bien, l’histoire, bien, en fait, y’a tout qui est bien dans ce film…Le seul soucis c’est qu’Audiard se renouvelle pas…C’est dommage, il y aurait pu y’avoir quelque chose de nouveau…
@ Sélénie
En justice pour cet article? Pour quel motif officiel ?