Antiviral de Brandon Cronenberg (2012)

Jusqu’où peut aller le culte de la personnalité ? C’est au moins à cette question que Brandon Cronenberg apporte une réponse avec son premier long-métrage. Brandon, 27 ans, est bien le fils de David. Ils auraient pu n’être que des homonymes, mais non, et la filiation ne fait guère de doute lorsque l’on découvre Antiviral.

Brandon Cronenberg a imaginé une société futuriste au sein de laquelle il est possible pour les fans les plus obsédés, de se faire injecter un virus non mortel porté par leur star favorite. L’idée est folle, originale et en tous les cas audacieuse.

Le héros du film (Caleb Landry Jones) est un jeune employé dans une clinique privée dédiée au business très lucratif des virus portés par des stars. En dehors de son travail, il participe à la contrebande de virus illégaux, potentiellement dangereux, et qu’il s’injecte à lui-même. Il se retrouve un jour infecté par le virus qui a provoqué le décès de la superstar Hannah Geist (Sarah Gadon). Dès lors promis à une mort certaine, sa seule chance de se sauver est de résoudre le mystère de la mort cette dernière.

Le film témoigne d’une grande ambition et d’une volonté de frapper fort. Le scénario très complexe mélange diverses pistes et idées que le néocinéaste peine parfois à exploiter correctement. Brandon Cronenberg manque encore d’un peu de maîtrise mais son premier film augure quand même de son audace et d’un sacré talent. B. Cronenberg s’inscrit dans un registre qui est celui des films de son père,  avec un goût partagé pour la chair, le sang et les sérums. La démarche est ô combien risquée mais il s’en acquitte avec les honneurs.

Antiviral regorge d’idées incroyables, narratives autant que visuelles. B. Cronenberg décrit une société littéralement cannibale où les stars sont réduites à l’état de viande à consommer, un monde paranoïaque et effrayant, aseptisé, désincarné, fascisant, et de plus en plus immatériel. Le cinéaste joue aussi des contrastes entre simulacre, apparence trompeuses et une horreur pure qui est quasiment palpable.

Clairement, Brandon Cronenberg a plus d’un tour dans son sac. Antiviral dérange et dégoûte, impressionne et imprègne les consciences. La seule chose qui rassure, c’est de se dire que le monde qu’il décrit est un cauchemar qui ne trouvera jamais aucune réalité. Ce qui inquiète et questionne, c’est de se dire qu’en fait, on en est pas tellement certain.

Le film impressionne mais n’est pas exempt de défauts, quand même tout-à-fait pardonnable et d’autant plus pour un premier film. Le scénario est sans doute trop alambiqué, dérape parfois un peu quitte à donner l’impression que le cinéaste ne sait pas trop où il veut nous amener et comment terminer son histoire. Heureusement, il finit par s’en sortir très bien, par une dernière image dingue et qui démontre assez nettement la volonté de Cronenberg fils de marquer les esprits. Il se laisse certes aller à la surenchère mais dans des limites cohérentes et acceptables.

Il faudra certainement attendre son prochain film pour savoir de quel trempe est réellement fait Brandon Cronenberg, s’il est un cinéaste réellement capable de tracer une voie digne de celle de son père. Antiviral est en tous les cas un film suffisamment trouble et puissant pour que l’on prenne déjà date avec lui pour l’avenir.

Benoît Thevenin

Antiviral ****

Sortie française le 13/02

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