Infancia clandestina de Benjamín Ávila (2012)

Dans la présentation qui a eu lieu avant la projection, le réalisateur Benjamin Avila nous a expliqué que le sujet du film était très autobiographique et qu’il s’identifiait parfaitement au personnage principal, un jeune garçon d’une douzaine d’années, Juan. A la vision du film, on ne peut qu’être surpris, le sujet étant très fort. Infancia Clandestina nous emmène dans l’Argentine de la fin des années 70 auprès des groupes révolutionnaires fidèles à Isabel Martinez de Perón, présidente renversée par la junte militaire du général Videla en 1976. C’est dans l’un de ces groupes de résistants que le petit Juan est né et qu’il vit avec sa famille dans une clandestinité totale. Balloté de ville en ville, exilé à Cuba, puis au Brésil, il revient s’installer dans une nouvelle ville avec son oncle et ses parents. Tout dans sa vie doit être dissimulé. Son identité est un mensonge et, quand on a 12 ans, tout ça est très difficile.

Le film prend le parti d’évacuer le discours politique et adopte le point de vue de Juan, lequel ne comprend pas très bien pourquoi il est si important pour ses parents de vivre cette vie de parias révolutionnaires. Il le voit d’abord comme un jeu, fasciné par les armes, par l’aventure que cela implique (les cachettes dans le garage etc…) mais il est très vite rattrapé par la réalité concrète de cette situation, la peur, la violence et ne pas savoir de quoi demain sera fait. Quand tout cela se confond avec l’évolution naturelle d’un enfant de 12 ans qui connaît ses premières amours c’est forcément compliqué.

Benjamin Avila, très investit dans son sujet, l’illustre avec beaucoup de style. C’est vraiment l’un des points forts du film, sa mise-en-scène très maîtrisé et agréable à l’œil. Que ce soit la photographie très belle et chaleureuse, ses cadres très travaillés ou encore l’utilisation de la musique (bien qu’au final trop présente et mièvre) on a affaire à un vrai metteur en scène avec une vision forte de la manière avec laquelle il veut raconter son histoire. Il y a notamment cette très belle idée, présente dès les premières images, de dédramatiser les scènes de violence par un recours à l’animation. En plus d’en faire des séquences visuellement très réussies, cela représente bien la manière dont Juan a pu réimaginer les horreurs qu’il a vécu pour échapper à leur traumatisme.

Au final ce que l’on peut reprocher au film c’est, malgré son caractère autobiographique, une construction finalement trop classique et prévisible avec une écriture trop appliquée et scolaire. On n’est jamais vraiment surpris, on suit un chemin que l’on semble avoir déjà emprunté auparavant, que ce soit dans l’évocation des émois de Juan ou des activités terroristes de ses parents. Cela n’empêche heureusement pas l’émotion de percer et le film n’en manque pas. Il a même une vraie vigueur, une certaine rage qui le traverse et qui à n’en pas douter est la traduction littérale des expériences du réalisateur sur pellicule.

Grégory Audermatte

Infancia clandestina ***1/2

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