Tisser des ponts entres les générations, c’est l’un des motifs les plus importants de l’oeuvre de Naomi Kawase.
Deux ans après Les Délices de Tokyo, sur la belle relation entre une dame septuagénaire et un jeune vendeur de dorayakis, celle qui est aussi la réalisatrice de Shara ou encore La Forêt de Mogari, fait cette fois le portrait de Misako, une jeune femme sensible et un peu solitaire qui oeuvre comme audiodescriptrice de films. Lors d’une projection, elle rencontre Masaya, un photographe vieillissant et qui perd progressivement la vue.
A travers les réunions de travail durant lesquelles Misako révèle ses propositions de description à un panel de malvoyants – dont Masaya – Naomi Kawase pose son regard sur un métier méconnu et pourtant d’une complexe importance. S’il est naturel de se poser la question des enjeux de traduction pour un livre ou un film, il peut paraître moins évident pour le grand public que des aveugles ou malvoyants cherchent à aller au cinéma. Il n’y a pourtant aucune raison à ce que ceux-ci soient privés d’accès aux films, à leurs contenus et à leurs émotions, et la question de comment traduire le plus justement en description ce qu’il se passe à l’image devient alors particulièrement pertinente et même essentielle.
Misako semble douée dans son travail mais elle va trouver en Masaya, un homme blessé et rustre, un contradicteur qui la surprend. Les critiques du photographe, si elles peuvent sembler dures pour Misako, vont cependant l’amener à progresser encore dans sa tâche. Au delà du rapport difficile qui commence à s’installer entre la jeune femme et ce photographe qui à l’âge d’être son père, un rapprochement entre les deux va commencer à s’opérer, à mesure qu’ils se comprennent et s’appréhendent.
L’empathie et la bienveillance de la cinéaste pour ses personnages, la douceur de son regard et les quelques notes de piano qui tire le film vers le mélo font de Vers la lumière un petit objet de cinéma certes fragile, mais surtout beau et attendrissant.
B.T