La Guerre des Mondes (War of the Worlds) de Steven Spielberg (2005)

La Guerre des mondes a toujours reflété l’état géopolitique de la planète. Le livre de H.G Wells évoquait le colonialisme ; le film de 53, par Georges Pal associait l’invasion extraterrestre à la menace communiste. Aujourd’hui, La Guerre des Mondes renvoie inévitablement au contexte post 11 septembre. A ce titre, une scène emblématique : Rachel (Dakota Fanning) hurlant de panique et demandant à son père si ce cauchemar est dû à de quelconques terroristes.

Spielberg a placé la question de la survie au centre de son film. La Guerre des Mondes décrit comment un homme simple va échapper au désastre. Dans ce genre de film, l’accent est généralement mis sur l’héroïsme. Il est ici totalement absent. Spielberg s’intéresse aux lâchetés humaines, à ses bassesses, à ses comportements les plus instinctifs, les plus primaires.

Ray Ferrier (Tom Cruise) est donc l’anti-héros, un père irresponsable, profondément égoïste et en froid avec sa famille. Quand la menace se précise, il se pose exactement les mêmes questions que celles qui tourmentent déjà sa fille. Il n’en sait pas plus qu’elle et lui aussi à peur. La seule réponse qu’il trouve est la fuite. Il ne réfléchit plus, il survit. Les circonstances font qu’il peut s’enfuir. Il a aidé à réparer un véhicule alors que tous les autres alentours ont subit les ondes magnétiques. Plus tard, dans la maison de sa femme, il survit car caché dans l’abris atomique situé au sous sol. Un avion s’écrase sur la maison. Là on peut dire qu’il a eu chaud…



Si le patriotisme n’est pas fortement exalté dans ce film, il trouve malgré tout son représentant avec Robbie (Justin Chatwin), le fils de Ray. Il est normal que le fanatisme s’exprime à travers lui. L’agression que subit un pays engendre fatalement une réaction. Le patriotisme, c’est la défense à tout prix. On ne réfléchit plus, il y a comme un devoir moral à vouloir se protéger.

Quelques semaines seulement après la sortie de La Guerre des mondes, il y a eu successivement les attentats de Londres et les ravages de l’ouragan Katrina. Ces événements ont démontrés en quelque sorte la rationalité du point de vue de Spielberg. Les images de La Guerre des Mondes sont exactement celles que l’on a reçu en provenance de la Nouvelle Orléans : exode, pillage etc.

La scène ou la famille Ferrier se fait agresser dans le but qu’ils abandonnent leur voiture est à ce titre saisissante. La primalité de l’être humain ressurgit. La suivie est d’abord un sentiment égoïste. L’autre n’existe plus et représente une menace potentielle.

la guerre des mondes

La longue séquence avec Harlan (Tim Robbins) rejoint tout à fait cette idée. Harlan incarne un personnage hanté par la trouille. Il inspire une réelle crainte. Spielberg nous à fait nous attacher à la famille Ferrier et ainsi, comme eux, nous sommes sur la défensive dès lors qu’un personnage totalement étranger s’associe à eux. On le sent pervers. Quelles sont ses intentions par rapport à la jeune fille ? Tout est menaçant en lui. On le sent également prêt à toutes les folies pour assurer sa survie, quitte à compromettre celle des autres. Le fait que Ray s’affranchisse de cette menace de la manière la plus ignoble qu’il soit, laisse à penser qu’il n’est ni pire ni meilleur qu’un autre. Lui aussi est réduit aux pires bassesses pour s’assurer de vivre.

Avant ce meurtre, une scène absolument clée intervient : Ray essaye de se persuader devant Harlan que sa famille à été préservée de tout ceci. On le sait depuis le crash de l’avion : les scènes de désastres ce sont propagés à vitesse grand V. Dès lors, quelle est la probabilité que l’ex-femme de Ray aie échappée à tout ceci ? Quelle est, aussi, la probabilité que Robbie ait survécu à son assaut désespéré contre les extraterrestres ? Dans une telle situation de chaos, lorsque l’espoir est à ce point réduit à néant, il n’existe plus qu’une seule chose : le rêve. Ray imagine alors une chose. Plus que cela, il tente de s’en convaincre et ne se rattache qu’à cette image. Il rejoindra Boston. Là bas, il retrouvera son fils, sa femme et il sera heureux de constater qu’ils ont sains et saufs…

Après tout ceci, Ray et Rachel vont se retrouver à leur tour prisonnier mais vont finalement s’en sortir quasi miraculeusement. Ensuite, la nature reprend le dessus et la menace disparaît.

Arrive alors le dénouement, objet de toutes les controverses.

De E.T à Hook, de Rencontre du Troisième Type à A.I, une forme de poésie jalonne l’œuvre de Spielberg. Il semble important de le souligner car cette conclusion s’intègre parfaitement à cette idée.

Les paysages apocalyptiques laissent place à la douceur de l’automne. Les feuilles mortes tombent sur le sol. La rue est déserte. Ray avance, portant dans ses bras Rachel. En contre champs, son fils l’accueil. Ce fils qui éprouvait un tel dégoût pour son père quelques heures avant coure cette fois en sa direction et se précipite dans ses bras. Dans le même temps, son ex-femme, le mari de celle-ci, les beaux-parents, autant de personnages quoi n’avaient pas moins de mépris pour Ray, lui adresse cette fois, tous, le plus beau de leurs sourires.

Cette scène est l’exacte copie de ce que Ray avait confié à Harlan plus tôt. Elle semble émaner de nulle part, paraît tellement fausse tant elle est en décalage avec le reste du film. Aucune trace de chaos ici, tout est parfait. Un rêve en somme. Cette scène, c’est le rêve de Ray tel qu’il l’avait confié. L’espoir auquel il s’est raccroché et qui lui a permit de survivre. Cette conclusion, il semble absolument ridicule de la prendre au premier degré. Un rêve, un simple fantasme, comme pour symboliser que l’humanité survivra tant que l’espoir subsistera.

Spielberg à réalisé le film le plus sombre de sa filmographie mais peut-être aussi l’un des plus aboutit. En éternel idéaliste, il conclu ce film par une note d’espoir. Il est certain que si l’on ne comprend pas cette fin, on ne peut que déconsidérer ce film.


La Guerre des mondes – Note pour ce film :
Sortie française le 6 juillet 2005

Email

Laisser une réponse