Alpe d’Huez 2009/Grand Prix et Prix du public
Grand prix du Jury et Prix du public lors du dernier festival de comédie de l’Alpe d’Huez, La Première étoile est un petit film honnête et sincère, chaleureux et drôle, une heureuse surprise.
Lucien Jean-Baptiste incarne le rôle d’un père qui peine à subvenir aux besoins de sa famille et qui dilapide le peu d’argent qu’il gagne au tiercé. Son épouse (Anne Consigny) n’en peut plus et ne supporte pas son insouciance lorsqu’il promet le rêve illusoire de promener sa petite famille… au ski. Au delà des difficultés financières que rencontre la famille, le projet est d’autant plus risibles aux yeux de ses proches qu’il ne semble pas naturel qu’une famille d’antillais débarque sur les pistes.
La Première étoile est le premier film en tant que réalisateur de Lucien Jean-Baptiste, un acteur terriblement méconnu que l’on a seulement aperçu chez Richet (De l’amour) ou Balasko (L’Ex-femme de ma vie), et découvert un peu plus à travers le polar 13m2. Puisque l’on est jamais mieux servit que par soi-même, le réalisateur s’est offert un rôle, le premier, et y prend manifestement un plaisir manifeste. Pari amplement gagné, on a maintenant très envie de le revoir dans des rôles consistants et autres que vigile, policier ou truand…
Le premier essai de Lucien Jean-Baptiste derrière la caméra offre aussi une formidable bouffée d’oxygène, tant au cinéma populaire français, qu’a ses spectateurs, puisque nous sommes tous plus ou moins plongé dans le marasme d’une crise économique qui plombe le moral de beaucoup de monde.
Du reste, le film s’intègre parfaitement au contexte économique dans lequel il sort. Le personnage de Jean-Gabriel est en galère jusqu’au coup, il subit un certain nombre de contraintes que son goût pour les courses d’aide pas à surmonter, et se retrouve donc à compter le moindre de ses euros. Il va falloir ruser pour partir à la montagne et payer ce charmant petit monde des vacances dignes de ce nom.
Si le film est une formidable bouffée d’oxygène pour le petit monde du cinéma français, c’est parce qu’au delà de son enthousiasme, du capitale sympathie qu’il dégage, La Première étoile offre une véritable visibilité à la minorité antillaise qui vit dans dans cette métropole. Le cinéma français tourne beaucoup trop le dos à toutes ses minorités dites raciales, et que La Première étoile, film familial par excellence, apparaisse soudain dans le paysage, ce ne peux qu’être une excellente nouvelle. En prime, le film s’offre un couple mixte puisque Lucien Jean-Baptiste forme ici un couple avec Anne Consigny. Or l’on sait à quel point la mixité à l’écran est quelque chose de rare chez nous. S’en est presque tabou.
Le ressors comique repose sur un certain nombre de clichés par rapport à la communauté antillaise. Le personnage de la grand-mère incarnée par Firmine Richard est d’ailleurs la pierre angulaire du procédé. Ce personnage est délicieux et porte largement tout le film. Autre cliché avec lequel le film s’amuse, cette sois-disante idée aberrante que les antillais et les noirs en général n’auraient pas leurs places sur les pistes de skis.
Le film n’est pas non plus parfait. Le happy-end final est convenu à souhait, l’attitude moralisatrice du fils aîné (Jimmy Woha-Woha) est un peu plombante à la longue. On échappe pas à une sorte de mièvrerie mais ça ne perturbe pas la vision d’ensemble du film. La Première étoile est un film éminemment sympathique, souvent drôle et qui offre aussi quelques jolis moments, comme cette interprétation de Jean Ferrat par la petite fille de la famille (Loreyna Colombo), ou cette belle relation qui se tisse entre le jeune frère (Ludovic François) de cette dernière et le personnage incarné par Michel Jonasz. On note aussi la présence de Bernadette Lafont, une actrice qui n’a plus rien à prouvé et qui s’amuse dans des petits films qu’elle choisit bien (cf. Les Petites vacances, ou même Nos 18 ans). Pour notre plus grand plaisir.
B.T
La Première étoile – Note pour ce film :