Hier était révélé la sélection officielle de la prochaine édition du festival de Cannes, dans trois semaines (du 12 au 24 mai). Nous vous avons livré un premier panorama plus ou moins détaillé de cette sélection, mais prenons maintenant le temps de découvrir quels sont ces films qui seront présentés à Cannes dans la section Un Certain Regard.
Cette section est d’une certaine manière la voie de réserve des deux autres sélections majeurs du festival, celle officielle et la Quinzaine. La Quinzaine des réalisateurs permet la découvertes de cinéastes de tous horizons, connus ou totalement méconnus, mais tous singuliers, porteur d’une identité de cinéaste très forte et très personnelle.
Un Certain Regard est un peu l’antichambre de cette sélection là, car souvent elle accueille justement des cinéastes qui ont fait leurs armes cannoises du côté de la Quinzaine. Elle est aussi l’anti-chambre de la sélection officielle car souvent les meilleurs films d’un Certains Regard paraissent mériter plus que d’autres le droit de concourir pour la Palme. Mais Un Certain regard est importante car c’est une section qui justement sublime la notion de regard, d’un regard bien particulier. C’est ce qui reliera de toutes les manières chacun des films de cette section.
I. Roumanie et Philippines
Ces dernières années, deux places fortes de la cinématographie mondiales ont émergées : la Roumanie et les Philippines. De nombreux jeunes réalisateurs issus de ses pays ont signés quelques uns des films les plus passionnants des quelques années passées.
On retrouve dans cette section Un Certain Regard, au moins deux éminents représentant de ce renouveau du cinéma roumain. Cristian Mungiu, lauréat de la Palme d’Or en 2007 avec 4 mois, 3 semaines et 2 jours, présentera un ensemble de courts-métrages réunis sous le titres des Contes de l’âge d’or, et réalisés par Mungiu et quelques jeunes cinéastes de la nouvelle génération du cinéma roumain.
Cette nouvelle génération sera également représentée par Corneliu Porumboiu, un cinéaste que les festivaliers connaissent bien puisque son premier film, 12h08 à l’Est de Bucarest avait été une fantastique révélation en 2007. Le film avait d’ailleurs été récompensé par la Caméra d’Or. Cette année, Porumboiu présentera Policier, adjective, l’histoire d’un policier qui perd toute foi en sa fonction.
L’autre cinématographie émergente ces derniers temps est donc les Philippines. Comme en 2008, le principal représentant de cet archipel de l’océan Pacifique, Brillante Mendoza, concoure dans la sélection officielle pour la Palme d’Or. Il est un autre cinéaste Philippin qui s’est beaucoup fait remarqué également, le très jeune Raya Martin, lequel présentera son nouveau film Independencia. Raya Martin jouit d’une excellente réputation mais nous devons concéder ici un scepticisme certain. L’an passé, Raya Martin présentait à la Quinzaine des réalisateur, Now Showing, film fleuve de près de 5h qui nous a été une expérience absolument détestable de cinéma. La projection n’ayant toujours pas été digérée à ce jour, nous sommes passés à côté des autres films de Raya Martin, notamment A short film about the Indio Nacional, lequel est sorti sur quelques copies à Paris il y a quelques mois. Independencia nous réconciliera peut-être avec le cinéma de cet auteur résolument à part.
II. Les pointures de la section
En 2006, la révélation de la Quinzaine des réalisateurs avait été Bong Joon-Ho, dont le film The Host avait été une divine surprise, et la confirmation d’un talent hors-norme (on lui doit aussi Memories of Murder). Le cinéaste coréen présente cette année Mother, l’histoire d’une maman déterminée à prouver l’innocence de son fils accusé d’un meurtre horrible. C’est la seconde année consécutive que Bong Joon-Ho fréquente la section Un Certain Regard. En 2008, il était la dernière signature de Tokyo !, le programme de courts-métrages co-signés avec Michel Gondry et Léos Carax.
Depuis 2004, nous n’avions plus de nouvelles de Hirokazu Kore-Eda, réalisateur du sublime Nobody Knows. Et là, coup sur coup, deux films réalisés par le cinéaste nous parviennent ! Le premier, Still Walking – nous y reviendrons probablement dans les prochains jours dans les pages de Laterna Magica – vient tout juste de sortir dans les salles. Le second, Air Doll sera lui présenté dans la salle du Théâtre Debussy. Le film paraît plus léger que les précédentes oeuvres du cinéastes, lequel a assez largement exploré dans ses précédents films les questions du deuil (Maborosi, Still Walking) ou du délitement social (Nobody Knows). Dans Air Doll, une poupée gonflable prendra vie et tombera amoureuse d’un employé de vidéo-club !
Puisque nous sommes en Asie, restons y et envolons nous vers la Thaïlande, le pays de Pen-Ek Ratanuarang, réalisateur de Vagues invisibles et de Ploy, présenté lors de la Quinzaine 2007. Nang Mei est annoncé comme un film d’épouvante mais nous savons de toutes les manières que peu importe le genre, l’expérience d’un film de Ratanuarang est toujours particulière. Une claque esthétique est à prévoir.
Le cinéma iranien semble en recul, tout au moins en terme de représentation cannoise et celà se confirme cette année. Le cinéma d’Iran affiche pourtant toujours une vitalité épatante. Celui qui aura la charge de nous en apporter la preuve n’est autre que Bahman Ghobadi, le réalisateur d’Un Temps pour l’ivresse des chevaux et des Chants du pays de ma mère. Nous n’avons pour le moment aucune informations concernant Nobody Knows About The Persian Cats…
Pavel Louguine est peut-être le cinéaste Russe le plus facilement abordable aujourd’hui. Taxi Blues, La Noce, ou Famille à vendre sont des films assez fous, assez imprégnés de Vodka pour être bien reçus partout. Lounguine reste néanmoins sur L’île, un film particulièrement austère même si fascinant en de nombreux aspects et qui est sorti l’année dernière dans les salles françaises. Cette année, Pavel Lounguine revient à Cannes, presque vingt ans après son prix de la Mise en scène pour Taxi Blues, avec Le Tsar, une évocation d’Ivan le Terrible. Le projet ne manque pas d’ampleur. Sans doute un des gros morceaux de cette section.
Cinéaste culte pour la communauté gay (et cinéphile), réalisateur de O Fantasma et de Odette, Joao Pedro Rodrigues nous proposera lui de Mourir comme un homme, titre de son nouveau film. Le film évoquera la question de l’identité sexuelle à travers celle du changement de sexe pour un travesti.
III. Les français.
Ils sont quatres représentants dans la sélection officielle et trois seulement dans celle de Un Certain Regard. Pour le très atypique Alain Cavalier, cette présence dans cette section là n’est surtout pas une surprise. Le réalisateur montrera son Irène, film grâce auquel il prolongera sans doute son travail de filmeur autobiographique.
Les deux autres cinéastes français sont moins connus, encore jeunes, et ont en commun un talent précoce à confirmer.
Mia Hansen Love est née à Cannes puisque c’est à la Quizaine que nous l’avions découverte en 2007 avec son très beau premier long-métrage, Tout est pardonné. On la retrouve cette année avec Le Père de mes enfants un film inspiré de la vie du regretté producteur de son précédent film, Hubert Balsan.
Sauf erreur de notre part, Denis Dercourt n’a lui encore jamais connu les honneurs d’une présence cannoise pour l’un de des films. Le réalisateur des Cachetonneurs et de La Tourneuse de pages présentera Demain dès l’aube…, l’histoire de deux frères dont l’un (Vincent Perez) essaye d’extirper son cadet (Jérémie Renier) de son addiction au jeux de rôle.
IV. A suivre…
Eux, on ne les connais pas ou si peu… Mais si les sélectionneurs d’Un Certain regard les ont choisis, c’est qu’ils ont sans doute des qualité à faire valoir.
Le cinéma américain est globalement peu mis à l’honneur de Cannes cette année. Tout juste retient on le film d’ouverture des studios Pixar et les présences en compétition officielle de Tarantino et… Ang Lee (auquel on peut ajouter Sam Raimi, hors compétition). Du côté d’un certain regard aussi le cinéma américain est réduit à sa portion la plus congrue. Precious, réalisé par Lee Daniels – le producteur de The Woodsman avec Kevin Bacon – attisera forcément la curiosité puisque les chanteurs Lenny Kravitz et Maria Carey figurent au casting. Le réalisateur avait déjà dirigé Lenny Kravitz en 2006 dans Iced, un film resté inédit en France.
Autre représentant américain, la documentariste Paula Weiman-Kelman qui nous proposera de suivre le voyage d’un groupe d’américain en Israël, avec Eyes Wide Open.
Le brésilien Heitor Dhalia a quand à lui réussi à réunir Vincent Cassel et la bien nommée Camilla Belle, dans son film A Deriva. L’actrice américaine est originaire par l’un de ses parents du pays de Lula, ce qui explique sans doute sa participation au film. Le film évoquera la découverte de la sexualité d’une jeune fille laquelle est aussi perturbée par les multiples aventures de son père.
On notera la présentation d’un autre film sud américain, Los Viajes de Viento du colombien Cirro Guerra, déjà réalisateur de L’Ombre de Bogota, un premier film remarqué et sorti dans les salles français en 2008.
Egalement sélectionnés dans la section Un Certain Regard : Tales in the darkness du russe Nikolay Khomeriki, Samson et Delilah de l’australien Warwick Thornton et The Silent army du néerlandais Jean Van De Velde.
B.T
- Un Certain regard 2009 : le line-uo complet
Mother de Bong Joon-ho
Irène d’Alain Cavalier
Precious de Lee Daniels
Demain dès l’aube de Denis Dercourt
A deriva de Heitor Dhalia
Kasi az gorbehaye irani khabar nadareh de Bahman Ghobadi
Los viajes de viento de Cirro Guerra
Le Père de mes enfants de Mia Hansen-Love
Contes de l’âge d’or de Cristian Mungiu, Ioana Uricaru, Hanno Höfer, Razvan Marculescu, Constantin Popescu
Tales in the darkness de Nikolay Khomeriki
Le Tsar de Pavel Lounguine
Nang Mai de Pen-ek Rtanaruang
Independencia de Raya Martin
Policier, adjective de Corneliu Porumboiu
Mourir comme un homme de Joao Pedro Rodrigues
Eyes wide open de Paula Weiman-Kelman
Samson et Delilah de Warwick Thornton
The Silent army de Jean Van De Velde
Air doll de Hirokazu Kore-Eda