On a eu Paris, je t’aime, Chacun son cinéma (sorte de Cannes, je t’aime) et on aura bientôt New York, I Love You. Tokyo !, en revanche, est presque un cri de désamour. A moins que… Car qui aime bien châtie bien.
Tokyo ! compile trois moyens-métrages très différents les uns des autres et signés par Gondry, Carax et Bong Joon-Ho, le réalisateur de The Host. Le résultat est aussi étrange que brillant. Les trois films se répondent admirablement et donne une image assez loufoque de cette ville folle qu’est sans doute Tokyo.
Interior Design/ Michel Gondry : Un jeune couple cherche à s’installer dans Tokyo. Ils sont hébergés provisoirement par un ami. Les personnages se perdent rapidement dans l’immensité de cette ville. La jeune femme subit même une transformation étonnante. L’univers bric-broc de Gondry s’adapte parfaitement à cette fable mélancolique bercée par la musique d’Etienne Charry, un des membre de Oui-Oui, l’ex-groupe de rock de Michel Gondry. Les fans de Gondry se retrouveront forcément dans ce petit film simple et beau, un peu dans le ton de La Science des rêves.
Merde/Leos Carax : Une créature surgit des égouts de la ville et terrorise tous les individus sur son passage. Cannes est le seul endroit ou une rencontre avec Carax, grand cinéaste à l’oeuvre malade, est encore possible. C’est à Cannes que Pola X fût d’abord montré (et profondément détesté par beaucoup) et c’est encore à Cannes que l’on retrouve Carax avec Tokyo !, dix ans plus tard… Tourné rapidement et clandestinement, le film risque d’en laisser encore beaucoup circonspects. Merde, c’est sans doute ce que Carax hurle à la gueule de ceux qui le déteste. Merde est aussi le nom de son personnage, une créature vulgaire et terroriste bientôt capturée et jugée. Merde est une sorte de Godzilla humain, un monstre improbable et incompris. Un peu comme Carax qui livre encore une fois un film complètement fou, libre, baroque, bordélique même, et provocateur. La provocation risque d’ailleurs d’être très mal perçue par certain. C’est tour à tour drôle et consternant mais on en garde finalement que le caractère jouissif. En espérant que Carax (toujours vivant !) ne se laisse pas enterrer encore.
Shaking Tokyo/Bong Joon Ho : Reclus volontairement dans son appartement depuis près de 10 ans, un homme tombe subitement amoureux de sa livreuse de pizza. Le phénomène dit des Hikikomoris est semble t’il assez courant au Japon. Ryû Murakami en a d’ailleurs tiré un roman fabuleux et essentiel, Parasites. Le film de Bong Joon Ho est lui un petit chef d’oeuvre de sensibilité, de délicatesse, en plus de receler de trouvailles visuelles. Une petite histoire surprenante et attachante, probable sommet de cet audacieux et très joli programme de film-sketchs.
B.T
Avec Ayako Fujitani, Ryo Kase, Ayumi Ito, Nao Omori, …
Année de production : 2007
Sortie française le 15 octobre 2008