Mutants de David Morley (2009)

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Selon une idée reçue, le cinéma d’horreur français va mal. « Mutants », premier long-métrage de David Morley – jeune réalisateur découvert à Gérardmer ou il a été primé – nous arrive pleins de promesses. Le résultat est inégal mais l’initiative intéressante en divers points…

Remettons de suite les choses au clair ! Il est d’usage de dire que le cinéma de genre français se porte au plus mal, mais si l’on se penche un peu sur la question, on ne peut souscrire à cette idée. Le cinéma de genre et d’horreur en général accouche rarement de vraies réussites. Les américains ont un savoir faire qui est indéniable mais leurs productions horrifiques est souvent détestable. Et contrairement à ce que l’on peut parfois penser, les espagnols, les japonais et les coréens ne font pas mouche à chaque fois.

Et en France ? Et bien en France, on ne se démerde pas si mal que ça : Haute tension d’Aja et Maléfique d’Eric Valette en 2003 ; Ils de Xavier Palud et David Moreau en 2006. C’est déjà pas mal, même si ces films ne sont pour aucun d’entre eux des chefs d’oeuvres. Certains ajouteraient le Martyrs de Laugier, auquel personnellement je n’adhère pas du tout, mais qui jouit de plus en plus d’une excellente réputation. Le film a de toutes façons des atouts objectifs à faire valoir, je suis le premier à le reconnaître.

A chaque fois qu’un de ces films est sorti, il y a eu comme un espoir de voir le genre sortir de l’ornière. Ce cinéma reste marginal, peu porteur auprès du grand public et les maisons de productions peinent à trouver de bonnes raisons de se lancer dans l’aventure. Ca ne changera jamais, sauf si un survival quelconque triomphe au-delà du raisonnable au box-office, ce qui n’est sans doute pas pour demain.

Les tentatives sont pourtant régulières et même si elles peuvent s’avérer ratées ou carrément navrantes, il est difficile de ne pas saluer le caractère décomplexé des initiatives françaises (Cf A l’intérieur ou même Frontière(s)).

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Mutants arrive quelques semaines après le désastre extrême d’Humains. Le moral des afficionados français était donc au plus bas. Une certaine attente pesait autour de la sortie de Mutants. Le réalisateur David Morley n’est pas un inconnu et son CV plaidait en sa faveur avant même la découverte du film. Lauréat du Grand Prix du court-métrage à Gérardmer en 2005 avec le dérangeant Organik (film autour de l’inceste), il signe en 2007 Morsure, court dans lequel on retrouve en gestation tout ce qui fera Mutants.

Le pitch de Mutants est tout ce qu’il y a de plus banal. Alors qu’un terrible virus réduit la population à l’état de zombies sanguinaires, un couple en fuite tente d’assurer sa survie et de rallier une zone sécurisée.

Encore une fois, le film démarre sur un accident de la route qui se veut surprenant. Cette tentative là est ratée mais le film démarre quand même tambour battant. Les balles siffles, les cervelles explosent, David Morley ne perd pas de temps pour nous faire entrer dans ses tranchés de l’horreur. Mais ce parti pris est aussi une limite du film, lequel ne prend jamais le temps de développer ses personnages. Au début du film, lorsque les deux personnages principaux jouent la carte de la méfiance quasi paranoïaque vis-à-vis d’une tierce personne, on peine à y croire. Et jamais nous ne nous identifierons aux héros.

Si Mutants est un film intéressant c’est pour son univers esthétique, sa violence sans compromis (ou presque) mais parfaitement gérée, son sens du cadrage, l’efficacité de la mise en scène et du montage. A tous les niveaux, c’est vraiment du bon travail, y compris la plupart des effets visuels, et c’est sans compter cette excellente idée que de faire se dérouler ce survival dans un paysage alpin et enneigé. Cinématographiquement, pour toutes ces raisons, ça a vraiment de la gueule. La bande-son est également une belle réussite, et confère aux images une certaines force.

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Le film n’est pourtant qu’une demi-réussite, la faute à des dialogues débiles, à l’apparition assez navrante d’un groupe de personnages qui par les espèces de blagues de l’un d’entre eux, plombe le film totalement. La direction d’acteurs n’est pas toujours satisfaisante, même si le couple Hélène de Fougerolle/Francis Renaud fonctionne encore assez bien.

Mutants est un film un peu bancal, parfois maladroit, mais une initiative vraiment prometteuse. D’autant plus que le métrage n’est jamais que le premier long de son auteur. Cela peut présager de belles réussites futures, dans le genre ou pas. Visiblement, David Morley a de la suite dans les idées, un sens du cinéma et du rythme, et sait s’affranchir de ses références cinéphiles (28 jours plus tard, The Thing, La nuit des morts-vivants etc.).
Mutants ne failli en tout cas pas trop à ses promesses et s’impose comme un honnête survival, dans la plus pure tradition du genre. La violence du film est assez jouissive, acharnée parfois, mais peut-être pas assez transgressive. On regrette surtout ces dialogues surécrits et qui pour certains passent mal, le jeu inégal des acteurs, pour certains bien trop dans l’excès. Cela gâche le film mais au final Mutants n’a pas à rougir face au 3/4 de la production horrifique actuelle.

Benoît Thevenin


Mutants – Note pour ce film :

Sortie française le 6 mai 2009

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Aucun commentaire sur “Mutants de David Morley (2009)”

  1. Foxart dit :

    Il me tente drôlement celui la !

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