Demain dès l’aube de Denis Dercourt (2009)

« Demain dès l’aube » est un thriller psychologique intense et original, qui se joue entre plusieurs niveaux d’une même réalité, et qui confirme le talent singulier de son auteur, Denis Dercourt.

Pour peu que l’on débarque dans la salle sans savoir à quoi l’on à faire, le début de Demain dès l’aube est pour le moins intriguant et étrange. Avant le générique, un duel entre soldats napoléoniens. Après le générique, une leçon de piano qui nous renverrait presque au précédent – et brillant – film de Denis Dercourt, La Tourneuse de pages.

Denis Dercourt signe là son sixième film. On l’avait connu avec une comédie inoffensive et sympatoche (Le Déménagement, 1997), retrouvé ensuite avec une autre comédie plus confidentielle, tout autant sympathique et tout à la gloire des musiciens amateurs (Les Cachetonneurs, 1999), puis suivi plus tard (après Lise et André et Mes enfants ne sont pas comme les autres) avec La Tourneuse de pages (2006), un intense thriller psychologique qui ne nous avait pas laissé insensible.

Avec Demain dès l’aube, le cinéaste prolonge son excursion dans ce registre, et toujours avec méticulosité, avec une rigueur et une habileté manifeste. Il faut dire que Demain dès l’aube propose un script relativement original, ou les divers niveaux d’une même réalité se mélangent de façon inquiétante.

Paul est un pianiste réputé qui éprouve le besoin de se rapprocher de sa mère malade, et de son plus jeune frère Mathieu, lequel développe des tendances associales. Mathieu vit une passion dévorante pour l’univers des jeux de rôles et retrouve régulièrement les autres membres de ce qui s’apparente comme une assez vaste communauté, laquelle rejoue grandeur nature les guerres napoléoniennes, notamment la Bataille de Wagram.

Mathieu réussit à convaincre son frère de le suivre, et si Paul accepte c’est avec comme première idée de surveiller un peu les activités de son cadet. Sauf que Paul, une fois initié, ne se sortira pas de ce monde complexe, fascinant et étrange, régit par des règles et des conventions très strictes.

Le film navigue comme cela entre deux mondes, celui des champs de batailles du XVIIIe, celui de la vie citadine ordinaire, avec cette originalité là que la déconnexion de l’un à l’autre est pour le moins basique. On repart juste en voiture à l’issue de la journée. La vérité est plus complexe car le jeu bouffe les joueurs lesquels sont sous sa totale emprise. Ainsi Denis Dercourt tisse progressivement les enjeux d’une curieuse guerre psychologique entre le musicien novice considéré comme un tire-au-flanc, et le chef de la communauté, lequel semble se croire réellement en train de se battre pour l’Empereur. Le degré de reconstitution est pour le moins spectaculaire et quelque part flippant.

La réussite de ce film tient autant à la précision du scénario qu’a l’intensité ressentie dans le jeu des acteurs. Jérémie Rénier est encore une fois impressionnant et Aurélien Recoing impose efficacement sa stature et sa droiture. Vincent Perez, dont le personnage est tiraillé entre ces deux là, s’en sort lui aussi admirablement. Le principe sur lequel repose le film n’est pas évident, mais on marche à fond. Demain dès l’aube nous apporte la preuve définitive du talent de Denis Dercourt, un auteur dont on parle peu, mais qui compte parmi les meilleurs actuellement.

Benoît Thevenin

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Demain dès l’aube – Note pour ce film :

Publié le jeudi 28 mai 2009. . Vous pouvez laisser un commentaire, ou faire un trackback depuis votre propre site.