Mourir comme un homme (Morrer Como Um Homem) de Joao Pedro Rodrigues (2009)

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Le troisième film de Joao Pedro Rodrigues est un bouleversant mélo qui est aussi peut-être son meilleur film…

Le titre  pourrait induire l’idée d’une dignité, qui est bien réelle dans ce film,  mais il faut comprendre à un sens plus littéral. Tonia est travesti depuis 20 ans et arrive à un carrefour de sa vie. Ses spectacles n’ont plus le succès de ses plus belles années et elle doit affronter la concurrence d’une jeune beauté noire qui prend déjà la relève. Tonia vit avec Rosario, un amant de l’âge de son fils, lequel ressurgit justement dans sa vie. Rosario aimerait que Tonia se fasse opérer pour devenir une vraie femme. Tonia s’est jusqu’alors refusé à cette démarche, par fidélité et croyance en la Bible. Pour être accueillie au paradis, il lui faudra mourir comme un homme…

Joao Pedro Rodrigues est une illustre figure du cinéma gay, déjà auteur de O Fantasma et d’Odete. Avec Mourir comme un homme, le cinéaste ne nous invite pas seulement à une plongé loin des préjugés et des caricatures de l’univers des travestis de Lisbonne, son récit est aussi et surtout celui du combat d’une femme contre la solitude. Joao Pedro Rodrigues n’a pas exactement la fantaisie d’un Pedro Almodovar dont on imagine que les comparaisons vont fleurir, plus ou moins justement. Le film du cinéaste portugais est bien un parfait mélo, mais décliné sur un ton plus réaliste, aux limites parfois du glauque, mais toujours avec un profond respect pour les personnages. On sent que le cinéaste les aime toutes.

Le film est empreint d’un sentiment de mélancolie très prégnant mais on se laisse embarquer parfois dans des moments de pure fantaisie, spécialement avec le personnage de Maria Bakker. C’est dans ses instants là que l’ombre d’Almodovar plane le plus.

Mourir comme un homme alterne comme cela divers registre, jusqu’au surréalisme parfois, notamment dans la scène de conclusion, la plus belle séquence de tout le film. Mourir comme un homme avait tout pour être un film difficile et pesant mais le cinéaste arrive à gérer tous les instants de lourdeur. Le cinéaste nous avait profondément ému avec Odete et il récidive là en s’aventurant sur un terrain que l’on connaît un peu avec Almodovar mais que le cinéaste portugais exploite à sa manière, avec sa sensibilité. Cela donne un film généreux, digne, attachant même pour quiconque n’est pas attiré par cet univers. C’est une des prouesses de Joao Pedro Rodrigues, lequel réalise là sans doute, rien de moins que son plus beau film. Et potentiellement le plus accessible.

Benoît Thevenin


Mourir comme un homme – Note pour ce film :


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