Navidad de Sebastien Lelio (2009)

Un second film totalement vain et inutile sur le passage à l’âge adulte par un cinéaste qui confirme son immaturité artistique.

Deux adolescents, Aurora (Manuela Martelli, déjà vue dans Mon ami Machuca et B-Happy) et Alejandro (Diego Ruiz), s’isolent dans la maison de campagne du père décédé d’Aurora pour passer Noël en tête à tête. Ils se disputent rapidement mais trouvent une jeune fille évanouie dans la remise…

Sebastian Lelio est l’auteur d’un premier film qui nourrit idéalement la perception de Navidad, même si ça n’aide en rien à aimer le film. La Sagrada familia a été tourné en trois jours, avec une caméra DV et sans scénario véritable, le cinéaste laissant ses acteurs improviser avec comme seule base, un pitch basique. L’action de ce film se déroule le temps du week-end pascal, avec un jeune homme qui présente sa petite amie à ses parents. Voila pour le point de départ.

La genèse de Navidad, nous la connaissons partiellement, Sebastian Lelio ayant bénéficié du soutien de la Résidence de la Cinéfondation pour développer son projet. Mais au-delà de ce fait, Navidad ressemble quasiment comme une goûte d’eau au premier film de Lelio, tant d’un point de vue esthétique (de constants gros plans, caméra au poing) que dans les thématiques principales (tuer le père, ambivalence sexuelle, religion etc.).

Cette fois, le film se déroule le temps du week-end de Noël. Aurora et Alejandro empruntent un petit sentier puis pénètrent dans la maison. Le lieu de leur retraite est d’emblée à l’écart du village, lui-même loin de Santiago du Chili, la capitale et la ville d’où ils viennent. Rapidement, le couple amoureux se délite dans une dispute absurde qui en trahit la fragilité et le peu de confiance qu’Alejandro a en sa partenaire, sinon en lui-même. Ale questionne d’abord sa petite amie. « Es-tu chaude ? » « Oui mais pas plus qu’une autre » lui répond elle en substance. Alejandro met ensuite sur le tapis une lettre qu’il a eu l’indélicatesse de lire après avoir fouillé dans le sac de sa belle. Il poursuit alors son interrogatoire et questionne Aurora sur son amie. « Aurora, es-tu lesbienne ? Plus tard, une deuxième jeune fille apparaît dans le récit. Elle est recueillie par le couple, lequel prend bien soin d’elle.

Navidad donne l’impression, comme La Sagrada Familia, d’être totalement improvisé. Le film ne dépasse jamais le cadre de l’anecdote futile. Cette nuit sera un peu particulière certes, mais si l’ambition du cinéaste est de nous raconter la jeunesse chilienne en perdition, on est navré de lui dire que ce thème largement universel a été mainte fois rebattu et de manière bien plus intelligente.

Le trio de personnage se retrouve dans un point commun qui est une obsession du cinéaste. Les adolescents ne pourront s’épanouir qu’en se libérant du joug parental. Pour Aurora, l’indépendance est déjà acquise. Son père est physiquement décédé et ce n’est pas un hasard si elle est le personnage le plus décomplexé, le plus responsable aussi,  du trio. Alejandro est lui en fuite, tout comme Alicia, leur nouvelle amie. Cette dernière n’est cependant en fugue que pour retrouver le père qu’elle n’a jamais connu.

Tourné quasiment intégralement en huis-clos, le film nous oblige à partager avec les personnages environ 1h30 de glande, de blabla adolescent, de grandes phrases sur l’amour qui ne font qu’étaler davantage l’inexpérience de la vie pour chacun. Evidemment, de la manière dont les dès ont été lancés à la base, la question de l’ambiguïté sexuelle ressurgit et qui rendra cette nuit si particulière.

Les personnages sont tantôt agaçants, tantôt attachants, mais le film se noie de toute façon irrémédiablement sous le flot de naïveté et de poncifs qu’il passe en revue. La réalisation, caméra au point et au plus près des personnages,  n’apporte pas grand chose, sinon une vague intention de nous faire ressentir les doutes de cette jeunesse sans repère. Les intentions sont palpables mais la démarche est maladroite. Navidad ne dépasse jamais vraiment le stade de l’anecdote puérile. Les anecdotes peuvent parfois donner de grands films, mais il faut pour cela une dose d’intelligence pour injecter assez de force et d’émotion au récit. Navidad est dépourvu de tout cela, l’anecdote reste inoffensive jusqu’au bout, avec une symbolique trop appuyée pour signifier la fin d’une époque et l’entrée dans le monde des adultes. Sebastien Lelio n’y est – artistiquement parlant – pas encore arrivé. Son film, à l’instar de La Sagrada Familia déjà, témoigne de son cruel manque de maturité.

Benoît Thevenin


Navidad – Note pour ce film :

Sortie française le 4 novembre 2009


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