Lucia Puenzo raconte une mystérieuse et troublante passion saphique dans la droite lignée de son précédent film « XXY ».
El Niño Pez, littéralement l’enfant-poisson, fait référence à une légende locale qui est racontée au cours du film et qui donne une profondeur poétique au récit. En cela, El Nino Pez ressemble énormément au précédent film de Lucia Puenzo XXY, Grand Prix de la Semaine de la Critique à Cannes en 2007. Les deux films ont en commun une même ambiance, à la fois sombre et métaphorique, un caractère trouble ou la question sexuelle est centrale. XXY racontait l’histoire d’une jeune adolescente hermaphrodite et des lourds questionnement qui la tourmentait en même temps que ses premières pulsions sexuelles se révélaient.
L’héroïne de XXY est incarnée par Inés Efron, laquelle est encore le personnage principal du second long-métrage de Lucia Puenzo. Cette fois, elle est Lala, la fille d’un juge à Buenos Aires. La famille est aisée et Lala est amoureuse de Guayi, la jolie servante paraguayenne de la maison. Un jour, le chef de famille est retrouvé mort et Lala disparaît…
Avec El Niño Pez, par rapport à XXY, Lucia Puenzo rend grâce à la féminité de son actrice, Inés Efron. L’ambiance est trouble, dès le début, quelque chose nous oppresse avant même la mort du père et qui est savamment entretenu. Cela tient au personnage de la servante, laquelle vampirise littéralement son entourage. Le trouble se cristallise d’abord autour de ce personnage là, parce qu’elle exerce par sa beauté, et sans le chercher véritablement, une emprise sexuelle qui n’a pas de limite. Elle est telle Méduse, et quiconque s’approche trop près d’elle succombe à ses charmes. Il y a néanmoins une vraie complicité, une sincérité dans la relation entre les deux amies mais par la fascination que Guayi inspire chez les autres, la jalousie, la passion prend des proportions dangereuses.
Lucia Puenzo mise beaucoup sur l’ambiguité sexuelle de Guayi et l’on ressent alors un trouble comparable à celui entretenu dans XXY. Le questionnement sexuel est quelque peu perverti et d’ailleurs, comme déjà dans son précédent film, la cinéaste injecte assez de noirceur à son récit pour le rendre d’autant plus étrange sinon perturbant. Ce que révèle l’intrigue de manière plus ou moins subliminale est dès plus malsain et dérangeant, mais Lucia Puenzo gère ça avec une admirable finesse. Le mystère découle aussi de la construction narrative du film, avec de réguliers fash-back dont on ne perçoit pas toujours immédiatement qu’il sont à détacher de l’intrigue dans son sens narratif le plus directement présent.
Lucia Puenzo confirme idéalement les promesses engendrées par son précédent film. Les ressorts sont quelques peu semblables, les films ont des similitudes, mais ils demeurent suffisamment singuliers pour que l’on remarque d’abord un style très personnel pour la cinéaste, une identité. On regrette malgré tout quelques maladresses, notamment la conclusion du film, un peu confuse et trop lourdement explicative.
Benoît Thevenin
El Niño Pez – Note pour ce film :
J’ai adoré XXY et notamment sa jeune actrice incroyable…
Je vais voir ça ce soir ou demain !