En façade, un couple apparemment sans histoire : elle, Anna, est institutrice. Lui, Georg, est fonctionnaire de police et s’apprête à être promu. Les tensions au sein de la famille existent. Les deux enfants, jeunes adultes, s’émancipent et ont quitté le foyer. Surtout, Anna est instable, très fragile psychologiquement. Lorsqu’elle pète les plombs, c’est Georg qui subit, sans broncher, sa violence…
Georg est assez réservé, effacé même. Il est apprécié de ces collègues mais sa petite vie bien rangée suscite des jalousies. Les apparences sont donc trompeuses. Georg est battu par sa femme et ce n’est pas banal. Anna ne supporte pas le calme de son époux, et encore moins sa réussite. Elle aussi est jalouse de Georg. Il ne se passe rien dans sa petite vie tranquille. Les enfants sont partis, le couple ne fait plus l’amour, les parents d’Anna font office de banque etc. Anna se sent humiliée, elle est en quête d’attention. Dans une scène, elle tente d’expliquer que sa violence, aussi pulsionelle peut-elle être, est aussi une tentative de réveiller son époux par rapport à la monotonie de sa vie.
Le cinéma allemand est en plein essor via notamment les films de « L’école de Berlin ». On nomme par-là tous ces films de jeunes cinéastes allemands révélés par la biennale de Berlin (cf. des films comme Montag, Requiem ou Ping Pong par exemple). L’un contre l’autre est assez emblématique de ce souffle nouveau qui déferle. Ces cinéastes sont assez dissemblables les uns des autres et « L’Ecole de Berlin » ne représente en rien un mouvement (théorique, esthétique, technique etc.) telle la Nouvelle Vague française. Néanmoins, tous ces jeunes cinéastes partagent un goût pour certaines thématiques dont celui, principal, de la famille et de ses dysfonctionnements. Le film de Jan Bonny s’inscrit donc dans cette thématique là. Au plus près de ces personnages, le cinéaste décrit un phénomène tabou dans les sociétés et en évitant toutes caricatures. L’un contre l’autre est un film assez éprouvant ou, à tout le moins, étouffant dont le sous-texte renvoie à un problème majeur des sociétés modernes : le renversement de valeurs, le non-respect dont sont victimes aujourd’hui les représentants de l’autorité. Pas plus tard qu’hier (5 juin 2007) à Metz, un juge des enfants s’est fait agressé de plusieurs coups de couteaux par une mère de famille, en pleine audience…
Benoît Thevenin