On avait découvert en 2004 un talent de cinéastes chez Elkabetz, frère et soeur. Un duo de réalisateurs inédit dont l’une, Ronit, et la Catherine Deneuve du cinéma israélien. Il y a quatre ans, Ronit et Shlomi Elkabetz livraient avec Prendre Femme le premier volet d’une trilogie consacrée à la femme israélienne contemporaine. L’espace diégétique de Prendre Femme étaient déjà circonscrit pour l’essentiel à un appartement de Jérusalem et s’y déroulait, sans aucune surenchère émotionnelle, une intense confrontation entre une épouse et son mari et une ombre, celle de l’amant. Depuis, on a revu Ronit Elkabetz filmée par d’autres, notamment – et magnifiquement – par Eran Kolirin dans La Visite de la Fanfare. Avec Les Sept jours, le retour vers la fonction de réalisateur coïncide logiquement avec la livraison du second volet de la trilogie initiée avec Prendre Femme. On retrouve les mêmes personnages mais les histoires sont indépendantes. La narration ne souffrirait donc pas d’un manque si jamais vous avez manqué le premier film.
L’espace est un peu moins réduit, le temps est un peu plus étiré, mais le principe est le même : un huit-clos dans lequel les secrets surgissent, les vérités se disent, les rancoeurs s’affirment. Les sept jours sont ceux du deuil que doivent respecter, conformément à la coutume, les membres d’une famille à la disparition d’un des leurs. La tradition est mise à mal dans ses Sept jours. Ils ne sont finalement prétexte qu’à une violente confrontations entre époux divorcés, veuves, oncles, frères, soeurs et leurs beauf’ respectifs. Les personnages qui s’affirment le plus sont les femmes, tout gravitant de toute façon autour de Viviane (Ronit Elkabetz). C’est à travers elle que toutes les tensions sont exacerbées. La famille éclate mais la femme triomphe, entre autres parce que les hommes sont lâches et vils. La morale est un peu étrange quand même. La femme, dans son image traditionnelle et rétrograde de bonne épouse au foyer, incarnait une sorte de ciment familiale, quoique dans une position soumise face à un homme fort. Là, le cynisme qui émane des films est terrible : les relations entre les individus, au sein même de la famille, ne sont entrevus que par le prisme de l’argent. L’homme est faible, le socle familiale fragile, la femme s’émancipe mais la famille est complètement dynamitée. Le renversement est brutale, comme les affrontements auxquels se livrent les personnages.
Le respect du deuil induit un rapprochement entre les membres de la famille. Ce qui arrive en fait, c’est donc tout le contraire. La contradiction est d’autant plus forte que, filmée constamment en grand angle et en plan séquence, la cohabitation des personnages dans le cadre est sans cesse obligée. L’intimité est impossible. La mise en scène provoque en un sens le malaise qui régit la demeure. La promiscuité engendre le chaos. Les Sept jours laisse quand même un sentiment bizarre. La mise en scène épurée, assez austère – jusque dans le décors et ses grand murs blanc – se conjugue à des scènes de disputes souvent longues et âpres. Le film est assez long (2H) et on en sort comme asphyxié, fatigué, sentiment que nous n’avions pas ressentis devant Prendre Femme ou la mise en scène jouait pourtant clairement la carte de l’étouffement. Un peu de déception cette fois, mais ce second long-métrage confirme quand même les belles dispositions de cinéastes affichées avec le précédent.
Benoît Thevenin
Les Sept jours – Note pour ce film :