Depuis plusieurs années, on n’attendait plus rien de la saga Star Trek. Depuis le très bon Star Trek : Premier Contact de Jonathan Frakes en 1997, retour aux origines qui apportait du dynamisme et un souffle nouveau (le film mettait en scène un nouvel équipage commandé par Jean-Luc Picard alias Patrick Stewart), la franchise était retombée dans l’oubli. Le space opera est un genre à part entière qui n’a pas souvent gâté les cinéphiles. Les dernières réussites notables datent déjà de quelques années : Pitch black et Les Chroniques de Riddick de David Twohy, l’épisode 3 de la prélogie Star Wars, La Revanche des Sith…
Le premier Star Trek, réalisé par Robert Wise, épatait par la profondeur de sa réflexion. Dans cet épisode, le Commandant Kirk et Monsieur Spock partait à la rencontre de V-ger, une entité interstellaire cherchant à entrer en contact avec Dieu. Les deux épisodes suivants étaient d’agréables divertissements, pas dénués non plus de sens et de questionnement. La saga s’est ensuite appauvrie.
Dans ce nouvel opus, relance officieuse de la franchise, on découvre la jeunesse du Capitaine Kirk et de Spock, non pas comme elle aurait dû être en réalité, mais comme elle a été modifiée par l’action d’une faction de Romuliens, ennemis jurés de la Fédération après les célèbres Klingons, revenus dans le passé pour anéantir Vulcain. Cet habile truchement temporel permet à J. J Abrams de ré exploiter les personnages et amener de nouvelles situations avec notamment l’intervention du vieux Spock mais sans pour autant renier l’œuvre originale. Star Trek par J.J Abrams se révèle une très bonne surprise. Le scénario est étonnement bien construit, développant ses personnages dans l’action alors que la plupart des blockbusters actuels, tels Transformers 2, se contentent d’aligner les scènes spectaculaires sans jamais explorer leurs personnages.
Si Star Trek : Premier contact lorgnait du côté du cyberpunk (on découvrait un 21ème siècle post troisième guerre mondiale et des hommes-machines proche de Tetsuo), et si le film original privilégiait, à l’instar de 2001 : L’Odyssée de l’espace, la réflexion philosophique, celui de J.J Abrams semble lui privilégier le récit épique, plus proche finalement de l’univers de l’ancienne trilogie de Star Wars que de l’univers de Star Trek. On sent chez Abrams le souhait de renouer avec des éléments qui ont jadis fait le succès des grands films d’aventures : bestiaire varié, duels à l’arme blanche et acrobaties avec par exemple la scène du saut en parachute dans l’atmosphère de Vulcain.
Le scénario de Star Trek choisit d’emblée la voie de la quête initiatique, dépeignant l’itinéraire de James T. Kirk et de Mr. Spock, de la jeunesse à l’âge adulte. Chacun possèdera son mentor. Pour Kirk, il s’agira du Commandant Pyke, et concernant Spock, ce sera plus trivialement son père, Sarek. Leurs mots resteront gravés dans la mémoire de nos jeunes héros, conditionnant leur futur : « Peux-tu te contenter d’une vie ordinaire, ou as-tu le sentiment d’être destiné à quelque chose de mieux, quelque chose d’exceptionnel ?» ; « Tu seras pleinement capable de choisir ta destinée, la question étant quel chemin vas-tu choisir ? ». Mais les deux hommes auront aussi un mentor en commun : le vieux Monsieur Spock, mis en travers de leur route par le biais d’un paradoxe temporel. Ce dernier leur en apprendra sur leur future relation : « Votre amitié se consolidera plus que vous ne pouvez l’imaginez, James. », et enseignera au jeune Spock comment « oublier la logique » pour écouter davantage ses sentiments. Car si ce Star Trek est un divertissement de haut vol, c’est surtout un film sur le destin, l’amitié et la rivalité.
Au niveau de la mise en scène, les séquences de batailles spatiales sont assez fluides et impressionnantes, nous offrant quelques très belles images, comme la destruction de Vulcain par la « matière rouge ». Mais l’utilisation systématique de la caméra portée finit par lasser, voire par donner la nausée. Le procédé avait son utilité dans Mission : Impossible III (dans la scène d’introduction) ou dans le pilote de la série Lost pour traduire le chaos de l’état d’esprit des personnages ; il est moins légitime ici.
Saluons le casting avec une mention spéciale à Zachary Quinto, bluffant dans le rôle du jeune Spock. Chris Pine, qui interprète quant à lui le jeune Kirk, a le même physique que William Shatner aux débuts de la série originale, et apporte à son rôle une touche de dérision rafraîchissante (la drague d’Uhura dans le bar, l’injection du virus qui le rend aveugle d’un seul œil). Zoe Saldana reprend quant à elle le rôle d’Uhura en y apportant une touche sexy et romantique. On découvre le lien qui l’unit à Spock : une improbable histoire d’amour qui apporte néanmoins un éclairage nouveau sur le personnage. Karl Urban se révèle crédible en Leonard Mc Coy, faisant preuve du même sarcasme qui caractérisait le personnage original, et enfin Simon Pegg s’approprie habilement le rôle de Scottie.
La rencontre entre le Spock original incarné par Leonard Nimoy et son double plus jeune est étonnante de crédibilité, faisant preuve d’audace et mélangeant habilement le vieux et le neuf.
Star Trek n’est pas pour autant un film parfait. La relation entre Kirk et Spock n’est peut-être pas assez exploité. Son méchant principal, incarné par Eric Bana, n’est pas tout à fait crédible, et la mise en scène manque d’unité stylistique et de souffle. Le film se révèle quand même une très bonne surprise. On sent la volonté de relancer la franchise via cette possibilité narrative de « réalité parallèle », et on se dit pourquoi pas, aux vues de la réussite de ce nouvel opus. Si Star Trek n’est pas le film de science fiction de la décennie et ne révolutionne rien, il a néanmoins le mérite de dépoussiérer la saga.
Michael Frasse-Mathon
Star Trek – Note pour ce film :
Un très bon film que j’ai adoré au point qu’il m’as vraiment donné envie de voir les autres films même si je sais qu’ils bénéficient d’un bouche à oreille assez décevant.
Vlad