Au départ il y a le best-seller de Roberto Saviano, jeune journaliste italien même pas trentenaire. Sa plongée dans l’univers de la mafia napolitaine lui a valu, par celle-ci, une condamnation à mort. Saviano vit sous protection policière. Il y avait donc chez Matteo Garrone une certaine audace à vouloir porter à l’écran le livre-enquête de Saviano. Le challenge était d’autant plus monstrueux que la mafia, sur-représentée au cinéma, véhicule pas mal de fantasmes. Et le cinéma de Mafia a assez de lettres de noblesses pour que se resserre encore plus l’étau sur l’approche de Garrone. Etant donné l’audace du roman, son caractère effrayant, il ne pouvait pas être question pour Garrone de s’inspirer du lyrisme des modèles américains que tout le monde à en tête.
Garrone privilégie donc une approche réaliste, ce qui n’enlève en rien le caractère percutant du film. La Camorra que l’on nous présente est vacharde, mesquine, intraitable, ultra violente. Une telle organisation ne peut de toutes façons pas avoir d’état d’âme. Le titre du film évoque tout à la fois la Camorra et Gomorrhe, cette cité du vice que décrit la Bible. Naples et sa région sont donc une sorte de Gommorhe moderne. La Camorra règne sur la ville et détient tout les business, y compris les poubelles – celà a fait l’actualité il y a quelque semaines. Dans Fast Food Nation, on nous expliquait qu’il pouvait y avoir des excréments de bovins dans les hamburgers des fast food. Avec Gomorra, vous allez notamment comprendre comment il peut y avoir des déchets toxiques dans la Mozarella.
Gomorra se construit autour de cette entité monolithique qu’est la Camorra mais à travers six trajectoires de groupes de personnages bien distincts. Ce qui est fort regrettable au final, c’est l’ampleur que prend le film, parce qu’il en manque… Gomorra est éprouvant à cause de la force du propos qu’il déploie. Mais c’est aussi un film un peu bancal, ou les trajectoires ont du mal à se recouper – ce n’est pas le but du cinéaste et ce n’est pas le problème en soit. Juste, peut-être parce qu’il semble dense et que c’est parfois impalpable, Gomorra paraît brouillon et manquer de souffle ce qui est infiniment paradoxale tant le film est impressionnant et parsemé de séquence d’une intensité terrible. Ca n’a rien à voir avec la violence magnifiée des films de Coppola, Scorsese ou De Palma. La violence de Gommora est simpliste, vicieuse, amorale… réaliste. Gomorra, trop décousu pour fasciner vraiment, s’avère frustrant en même temps qu’il marque par la force qui au final s’en dégage quand même. Le film a reçu le prix du Jury lors du 61e festival de Cannes.
B.T
Gomorra – Note pour ce film :
Avec tout le buzz médiatique et un conseil d’un ami, j’ai finalement vu ce film. Amère déception et j’aurai du écouter mon instinct.