Révélations (The Insider) de Michael Mann (2000)

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60 minutes, l’émission d’information la plus respectée et la plus regardée aux Etats-Unis… Michael Mann nous plonge immédiatement dans l’action. En préambule de son métrage, nous assistons à l’interview d’un chef du Hezbollah (Cliff Curtis) par Lowell Bergman (Al Pacino), producteur de 60 minutes. L’entrevue n’est qu’un préliminaire car il s’agit pour Lowell de convaincre le Cheick d’accepter une entrevue officielle avec le journaliste-présentateur Mike Wallace (Christopher Plummer). La séquence sert à montrer l’engagement de Bergman et a exposer au spectateur à quel point le programme de la chaîne CBS est une institution, un magazine d’investigation dont le sérieux et la respectabilité ne peut et ne doit pas être pris en défaut.

Lowell Bergman va bientôt s’intéresser à un autre client. Le Docteur Jeffrey Wigand vient d’être remercier par ses patrons de chez Brown & Williamson, puissant groupe de l’industrie du tabac. Bergman s’intéresse dans un premier temps à Wigand en tant qu’expert sur un sujet d’accidentologie lié à la cigarette. Il comprend rapidement que le scientifique tait des secrets encore plus importants. L’enjeu initial va être de le convaincre de révéler ce qu’il sait des mensonges de l’industrie du tabac…

Révélations illustre deux problématiques bien distinctes mais qui se rejoignent à la faveur de cette affaire. D’un côté, il s’agit de dévoiler un scandale sanitaire et de l’autre, de préserver l’indépendance et l’intégrité d’un média important face à la puissance d’un lobby tentaculaire et dangereux.

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Le film de Michael Mann est d’abord un ambitieux thriller, impressionnant d’ampleur et de maîtrise. Jeffrey Wigand doit faire face à d’immédiate pressions de la part de ses ex-employeurs. Une atmosphère suspicieuse, de paranoïa même, s’impose. Les mécanismes du thriller politique sont assez huilés pour que la machine impitoyable lancée contre Jeffrey se révèle une menace franchement vicieuse et menaçante. On est quasiment dans le registre du mythe paranoïaque, et il est difficile de faire la part des choses entre ce qui est crédible et ce qui fait office de fantasme. C’est un luxe que peut s’autoriser le cinéma, qui a peut-être une fonction de catharsis mais qui en tout cas, pour son emprise sur le spectateur, fonctionne ici à plein.

Le suspens qui se crée est savamment entretenu d’une part par une mise en scène au plus près des personnages, ou le gros plans en grand angle fait autant figure de style qu’il est vecteur d’une émotion étouffante. D’autre part parce que l’implication des comédiens confère au film une puissance extraordinaire. Russell Crowe et Al Pacino rivalisent et donne à leur deux personnage une telle consistance que Révélations est, de n’importe quel côté que l’on se range, du côté du journaliste ou du côté du délateur, une oeuvre qui se ressent physiquement. C’est d’ailleurs visible à l’écran, ou Al Pacino, et Russell Crowe plus encore, sont littéralement transfigurés par leurs personnages.

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Révélations est un film duquel rien ne dépasse, ou chaque seconde est importante et nous captive. Les 2h30 que constitue le métrage sont un sommet artistique de toute première envergure, le film est un morceau de bravoure dans son ensemble, pour la dimension psychologique très fine des personnages, pour le rythme incroyable qui est imprimé, pour la richesse d’un contenu qui permet de réfléchir autant à l’indépendance des médias, aux enjeux politico-financiers auxquels ils doivent se confronter mais aussi de s’intéresser à un thème de santé publique fort, qui même s’il n’est pas abordé au plus profond des choses, nous en dit assez pour que le message pénètre et fasse véritablement sens.
Et puis les comédiens, jusque dans le moindre second rôle, sont tous exceptionnels. Ils se hissent chacun à la hauteur d’une ambition de cinéma, en terme d’ampleur narrative et de maîtrise technique, qui est rarement éprouvée aussi parfaitement. Révélations n’est ni plus ni moins qu’un film parfait, un chef d’oeuvre du cinéma moderne, un film clé qu’en plus on ne se lasse jamais de revoir.

Benoît Thevenin


Révélations – Note pour ce film :

Sortie française le 15 mars 2000


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Aucun commentaire sur “Révélations (The Insider) de Michael Mann (2000)”

  1. John Plissken dit :

    Entièrement d’accord avec cette analyse, bien écrite et concise :-)

    Je pense que Michael Mann n’a jamais plus atteint ce niveau de qualité par la suite, même dans le pourtant somptueux Collateral.

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