Classique du film de guerre, Un Pont trop loin est une ambitieuse fresque réalisée par Richard Attenborough, pas encore réalisateur de Gandhi mais qui affirme déjà là sa maîtrise pour un projet d’une telle ampleur. L’ambition de ce film rappelle celle du Jour le plus long de Ken Annakin, réalisé quinze ans plus tôt en 62. Les deux films ont un point commun un prestigieux casting mais pas seulement. Très simplement, Le Jour le plus long et Un pont trop loin sont deux adaptations de deux romans du même auteur, Cornelius Ryan.
Le Jour le plus long racontait le débarquement des alliées sur les plages normandes, soit un film tout à la gloire de l’intervention américaine dans le conflit. Avec un casting aussi riche, on peut légitimement penser pour Un Pont trop loin à un film qui glorifierait le sentiment patriotique. Et bien ce n’est pas exactement le cas. Un Pont trop loin raconte l’opération Market Garden, le plus important plan de guerre jamais mis en place, initié par le Général Montgomery. Pour peu que l’on s’intéresse un tout petit peu à l’Histoire, on est donc au courant avant même de voir le film de l’échec de cette impressionnante opération, ce qui ne peut de toute façon pas vraiment être une surprise puisque le titre nous suggère quand même que quelque chose cloche : un pont TROP loin…
L’opération Market Garden visait à la prise stratégique des ponts au-dessus des principaux fleuves néerlandais dans le but de contourner la ligne Siegfried et d’accéder ainsi à la Ruhr, principale province industrielle de l’Allemagne.
Le film de Richard Attenborough est impressionnant pour le soin apporté à la reconstitution de toutes ces batailles. Un Pont trop loin tente vraisemblablement de coller au plus près de la réalité historique, sans oser une quelconque idéologie, sans tricher sur l’héroïsme des acteurs de l’Histoire. Cette remarque est à prendre avec des pincettes car je ne me prétend pas un fin connaisseur de l’Histoire, mais en tant que profane la démarche d’Attenbourough paraît honnête, qui ne verse pas non plus dans la leçon humaniste et reste au contraire très respectueux des évènements tels qu’ils semblent s’être déroulé.
En conséquence, le film parait relativement neutre, même si l’on ne peut s’empêcher de trouver les généraux allemand caricaturaux, mais on peut s’interroger aussi sur la difficulté de réaliser un tel film sans recourir un minimum à un certain manichéisme. En l’occurence, Un pont trop loin nous donne juste l’impression d’être juste dans son impressionnant travail de reconstitution. Les acteurs se partagent la tête d’affiche et ne se bouffent pas vraiment entre eux, ce qui aurait pu être à craindre. Chacun fait son travail sérieusement et on prend un certain plaisir à les voir tous défiler plus ou moins équitablement à l’écran et au premier plan de l’intrigue et de la mise en scène. Le spectacle est aussi au rendez-vous, car les scènes de batailles sont réalisés avec le même soucis du travail bien fait.
Un Pont trop loin n’est certainement pas un grand film de guerre mais pour toutes les raisons évoquées, il est un film infiniment respectable, rigoureux dans la forme et dans l’esprit, et qui est véritablement intéressant à découvrir.
Benoît Thevenin
Un Pont trop loin – Note pour ce film :
Sortie française le 15 juin 1977