L’Armée du crime de Robert Guédiguian (2009)

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Héros et martyr de la résistance communiste pendant l’Occupation allemande de la France, Missak Manouchian trouve en Robert Guédiguian l’homme le plus à même de porter sur les écrans de cinéma son combat. Le projet est on-ne-peut plus ambitieux, plus encore sans doute que celui du Promeneur du Champ de Mars, et on devine aisément a quel point il est personnel au cinéaste.

Les premières images, Manouchian et ses hommes dans le camion qui les conduit vers la mort, accompagnés par la douloureuse lecture en off de leurs noms nous embarque immédiatement sur un terrain délicat. La difficulté principale qui s’opposera à Guédiguian sera sa capacité à conserver oui ou non de la retenue par rapport à cette histoire.

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Disons le tout de suite, ce qui fait la réussite du film, et bien c’est justement que Guédiguian réussit ce pari là, il ne force d’aucune manière les traits et l’émotion. On sent le cinéaste infiniment respectueux de ces personnages, il reste à leur hauteur sans se risquer à l’emphase mais au risque – malgré tout bien pensé – d’un manque de souffle, d’épique pour une émotion finalement trop contenue.

Guédiguian dessine plutôt l’intimité de Manouchian et de quelques uns de ses fidèles mais au détriment de leurs actions les plus spectaculaires. Quand vers la fin Manouchian est sommé de frapper fort, le film paraît subitement assez décousu car justement le cinéaste se refuse à céder du champ au seul spectacle. Voilà qui n’est certainement pas un reproche. On contraire, de cette manière, le spectateur est invité à partager le quotidien de ces hommes. On est d’autant plus sensibles à leurs combats, on partage leurs idéaux, leurs angoisses et de cette manière le film nous capte et ne nous lâchera plus vraiment.

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On regrette quand même le travail de mise en scène de Guédiguian, qui ne s’élève pas plus haut que les téléfilms les plus inspirés. Cela dit, Guédiguian n’a jamais été réputé pour son sens de l’image mais plutôt pour le contenu, les idées, les discours de ses films. Il est donc inutile de lui intenter aujourd’hui un procès en ces termes.

Guédiguian réussit un formidable hommage à Manouchian et ses hommes. Il préserve très délicatement tout le respect qu’il leur témoigne. De fait, on sent comme une distance maintenue par le cinéaste. On devine qu’il n’est pas particulièrement à l’aise avec le sujet, qu’il craint de mal faire ou maladroitement.

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Heureusement, Guédiguian tient en Simon Abkarian non seulement un des acteurs les plus facinants de ces dernières années, mais aussi l’interprète idéal pour le rôle de Manouchian. L’acteur est formidable de force, de sobriété et de charisme. Il impose naturellement son tempérament de meneur d’homme, de chef de clan. Le couple qu’il forme avec Virginie Ledoyen – avouons qu’on ne pensait pas vraiment que ca allait de soi avant de voir le film – fonctionne à merveille. C’est même à travers l’incarnation très subtile de Virginie Ledoyen que le film réussit à nous toucher enfin.

On l’a dit, s’il y a un reproche à faire à L’Armée du Crime, c’est de rester trop à distance des choses, de ne pas laisser le temps à l’émotion de se déployer. Jusqu’à ce que le personnage de Mélinée voit le chiffon toujours accroché au balcon, jusqu’à ce qu’une larme coule discrètement sur son visage. L’instant est court, pudique, mais il est emblématique du film dans son ensemble.

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Le film n’est pas exempt de certaines carences, souffre de la trop grande pudeur du cinéaste par rapport à son sujet, mais Guédiguian n’a pas pour autant trahit la mémoire de Manouchian et ses camarades et a réussit le film qu’il espérait faire : un film honnête, intéressant, pas trop didactique et parfaitement tenu par l’ensemble du casting, Simon Abkarian en tête.

Benoît Thevenin


L’Armée du crime – Note pour ce film :

Sortie française le 16 septembre 2009

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Aucun commentaire sur “L’Armée du crime de Robert Guédiguian (2009)”

  1. Rom_J dit :

    Bon, ça confirme ce que je pensais de Simon Abkarian, que j’avais adoré dans Secret Défense (et accessoirement Casino Royale).

    J’avais peur que ce film tombe dans les travers des Femmes de l’ombre, de Jean Paul Salomé, que j’ai eu du mal à supporter jusqu’au bout. Cela n’a pas l’air d’être le cas, bonne nouvelle je vais pouvoir y aller !

  2. Axel dit :

    Y a des petits moments que je retiens, assez infimes, comme celui où le personnage d’Ariane Ascaride qui attend dans son lit que son fils revienne de mission. Et le film confirme tout le bien que je pense de Simon Abkarian qui est aussi un immense acteur de théâtre, qui a travaillé avec Ariane Mnouchkine et Irina Brook (si vous avez la chance d’apercevoir à la télé la capture d’Une Bête sur la Lune, ne la ratez pas !)

  3. Didier Callix dit :

    Un film sur la Résistance… de plus !
    On comprend que cette histoire puisse toucher R. Guédiguian personnellement mais on assiste là à une succession d’attentats, sans beaucoup d’émotion, sans ce fond subtil qui fait qu’un film est autre chose qu’une suite de scènes filmées.

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