La Horde de Yannick Dahan et Benjamin Rocher (2010)


Habitué des critiques à la machette, chroniqueur passionné et parfois énervé, Yannick Dahan est attendu au tournant avec La Horde, son premier long-métrage, coréalisé avec Benjamain Rocher. L’oeil et la science du genre, les réalisateurs l’ont, ce qui leur donne un minimum de crédit, bien que l’on sache pertinemment que l’on ne s’improvise jamais réalisateur par un simple claquement de doigt. Ce qui laissait quand même sceptique, c’est les promesses perpétuellement insatisfaites d’un cinéma d’horreur (pour ne parler que de ce genre là) français de qualité, notamment le ratage du film de Xavier Gens – ami de Dahan qui y effectuait une furtive apparition – avec Frontière(s).

Avec La Horde, Dahan et Rocher trouvent un équilibre juste entre violence et comédie, sans jamais que l’outrance ne confine au nanar, sans jamais que la violence extrême ne devienne le seul argument du film. Les réalisateurs mettent manifestement beaucoup de coeur à l’ouvrage, à travers une mise en scène soignée, des décors bien choisis et une ambiance idéalement glauque. Le duo se contente d’effleurer quelques revendications sociales, cède quelques allusions (notamment par le fait que, dans le film, la cité de banlieue dans laquelle se situe l’action est oubliée des pouvoirs politiques trop occupés à gérer le cas de Paris) mais sans en faire un fond de commerce, sans insister lourdement. En clair, La Horde ne pète pas plus haut que son cul. La sincérité de la démarche n’est jamais remise en cause et, au contraire, l’enthousiasme et la passion à faire ce film, on les retrouve dans presque toutes les scènes.

On peut revendiquer éventuellement une relative absence d’histoire (ce n’est pas la narration qui nous passionne) et des personnages très stéréotypés mais là n’est vraiment pas le problème. Le scénario tient la route, ne verse pas dans le n’importe quoi et assume ses outrances quand il y en a. La Horde bénéficie en plus d’un casting très intéressant, Jean-Pierre Martins et Claude Perron s’opposent dans le film à Eriq Ebouanney et Jo Prestia, et l’on retrouve aussi Aurélien Recoing et Alain Figlarz. Des gueules que l’on identifie assez facilement au genre et qui assurent au métrage toute sa crédibilité.

Les scènes d’horreurs, bien qu’elles ne soient pas toujours très inventives, sont bien gérées par Dahan et Rocher, qui ne cherchent pas absolument à aller trop loin mais livre quand même un film sauvage qui évite trop de compromis. La bonne idée consiste au basculement de La Horde dans une seconde partie au ton radicalement différent, dès lors que l’horreur devient trop répétitive, que les personnages sont coincés et sans grande possibilité de progression dans l’histoire. Arrive alors la rencontre avec René (génial Yves Pignot), incroyable fou-furieux nostalgique de l’Indochine et qui va assumer à lui tout seul la part comique du film, véritablement jouissive et plutôt étonnante (« la jambe, la jambe » !)

La Horde tient finalement toutes ses promesses, qui figure immédiatement dans le haut du panier de la production horrifique française de ces 20 dernières années. Dahan et Rocher ne se laissent pas bouffer par les références qu’ils placent ici et là (de Piège de cristal à Une Nuit en enfer en passant par Assaut et L’Armée des morts de Zack Snyder), et ne versent pas non plus dans l’hommage. Le film est honnête dans ses intentions et son résultat, devrait satisfaire les fans du genre, et prouve que le cinéma de genre en France, de qualité s’entend, c’est possible. Yannick Dahan et Benjamin Rocher n’ont rien trahi des attentes qu’ont pu susciter le projet. Maintenant, on espère qu’une horde de spectateurs se précipitera vite à l’assaut des salles. Car sinon, à quoi bon ?

Benoît Thevenin


La Horde – Note pour ce film :

Sortie française le 10 février 2010

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Aucun commentaire sur “La Horde de Yannick Dahan et Benjamin Rocher (2010)”

  1. Cyrmen dit :

    Ca a l’air cool ^^
    J’aimais bien l’enthousiasme de Yannick Dahan présentateur sur Ciné Frisson.

  2. Foxart dit :

    Ah bah, faut maintenant juste me résigner au fait que le film n’est pas projeté à Lille cette semaine…
    Je n’ai donc plus qu’à attendre un piratage sur le net ou la sortie DVD car je ne compte pas vraiment sur le circuit Art et essai pour le diffuser dans les semaines à venir !
    Un grand merci aux distributeurs lillois !!!

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