Accablé par les dettes, en rupture amoureuse, M. Kim se jette d’un pont mais manque sa tentative de suicide. Il se retrouve coincé sur la déserte île de Bam, au milieu du fleuve Han qui traverse Seoul. La batterie de son portable est HS, il ne sait pas nager, personne ne l’entend, ni le voit malgré que la ville l’entoure et le nargue… L’étau est de plus en plus resserré sur lui mais M. Kim, dans une autre tentative désespérée de mourir, se rend compte que mettre fin à ses jours n’est vraiment pas aisé, ou du moins qu’il ne sait pas s’y pendre, si tant est qu’il ait réellement envie de partir. Du reste, il commence à s’adapter à sa nouvelle vie, s’en accommode peu à peu parfaitement, à tel point qu’il se sent enfin heureux et libre…
Variation de l’histoire de Robinson Crusoé, Castaway on the moon est une comédie attachante et inventive qui n’est pas non plus sans fond, même si la métaphore est évidente. Kim est exclu de la société, mis à la marge par sa banque autant que par sa petite amie. Il se noie presque littéralement. Sa marginalité est alors représentée par sa solitude sur l’île, alors même qu’il ne se situe géographiquement qu’à quelques encablures d’une mégapole bouillonnante. M. Kim découvre vite qu’il est bon à rien, qu’il est un individu totalement façonné par la société de consommation, qui ne sait que recevoir et acheter et qui se retrouve désemparer dès lors qu’il lui faut prendre son destin en main. Le film est alors très drôle tant l’on s’amuse de cette situation insolite et des efforts maladroits et parfois pathétiques d’un jeune homme ordinaire qui se débat un peu dans le vide. Son instinct de survie reprend quand même le dessus, et M. Kim s’en sort vaille que vaille.
M. Kim, Robinson quelque peu traditionnel, va bientôt se retrouver lié à une jeune femme Hikikomori, c’est à dire une Robinsone des temps modernes. Cette dernière, vit dans le périmètre étroit de sa modeste chambre obstruée par des sacs d’ordures. Elle ne communique avec sa mère que par SMS et vit sa vie, la fantasme plutôt, sur la toile. Sa seul fenêtre sur le monde réel, c’est ce télescope qui lui offre un point de vue sur Séoul et notamment l’île de Bam. Lorsqu’elle repère M. Kim, elle commence à se passionner pour lui, l’observe attentivement jusqu’à ce qu’elle se dise qu’il lui faut établir un lien avec lui qui ne parait guère envisageable étant donné leurs situations respectives. Mlle Kim va alors prendre son courage à deux mains, s’aventurer malgré ses peurs dans les rues de Séoul et réussir à jeter une bouteille que M. Kim trouvera.
A partir de là, Lee Hey-jun va élaborer une romance inédite et spectaculaire. La comédie romantique – naïve et sucrée comme le cinéma coréen sait le faire – s’impose mais le film n’oublie pas de rester drôle. Le cinéaste a de la suite dans les idées, avec des gags toujours plus attendrissants, qui respectent toujours les personnages plus qu’il ne les moque. Au delà de son charme simple, de ses aspects quelque peu potaches parfois, Castaway on the moon dissimule à peine une petite réflexion sur la pression sociale et l’incommunication dans nos sociétés modernes qui n’est pas vaine.
Certes, le film reste une avant-tout une comédie douce-amer, et c’est bien ce registre là qui séduit d’abord. Castaway on the moon s’avère au final être une excellente surprise, un film sensible et amusant, idiot mais pas bête, et que l’on savoure avec délectation.
Benoît Thevenin
Castaway on the moon – Note pour ce film :
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