Qu’arrive t’il à Kim ki-duk ? Révélation du cinéma d’auteur coréen du début des années 2000, Kim Ki-duk s’est imposé un rythme de travail impressionnant mais les films qui nous sont parvenus n’ont cessé de paraître toujours plus inégaux. Samaria pouvait paraître bâclé, Souffle et Time aussi, malgré quelques fulgurances de mise en scène qui ont suffit à garder confiance envers le cinéaste. Il faut remonter à Locataires, voir L’Arc (chacun en 2005), pour retrouver traces d’un Kim Ki-duk a son meilleur…
Dream est le dernier long-métrage en date du cinéaste. Il ne sort que maintenant alors qu’il a été tourné en 2008. Fallait il y voir un signe ? Kim Ki-duk n’est plus à la mode ? Le fait même qu’il n’ait apparemment rien tourné depuis prouve t’il que Dream marque comme un coup d’arrêt ?
Le film est dans la lignée du cinéma de Kim Ki-duk de ces dernières années : un cinéma moins sauvage (comme pouvaient l’être L’Île, Bad Guy ou Adresse Inconnue) qui ne semble plus avoir qu’une ambition poétique et esthétique (avec une esthétique au service de l’intention poétique). Dream n’est pas seulement dans la continuité des précédentes oeuvres du cinéaste, c’est aussi un film qui recycle carrément, une somme incroyable de motifs déjà croisé dans ses précédents films, dans Printemps, été, automne, hiver…, dans Coast Guard, dans Time, dans Locataires.
Kim Ki-duk nous embarque dans une improbable histoire dans lequel un homme reve un accident de voiture avant de se rendre compte que l’accident à bien eu lieu. Jusque là, le pitch est plutôt intriguant. Le cinéaste va nous entraîner bien plus loin dans le mystère, et dans le surnaturel, construit une relation tordue entre ses deux héros, pour mieux les faire basculer dans la folie pure. Kim décline une schéma déjà entendu dans ses autres films, sauf que sa narration est menée là de manière très brouillonne et sans soucis de cohérence. Kim Ki-duk assoit l’idée d’un univers fantasmagorique, dans lequel les personnages ne sont pas censé trouver des repères, et encore moins le spectateur. L’ennui, c’est que rien ne nous transporte cette fois, alors même qu’on s’est toujours raccroché à certaines idées lumineuses dans ces autres films, même les plus maladroit et/ou inaboutis. Kim Ki-duk dessine des personnages et des situations caricaturales. C’est même pire que cela : il se caricature lui-même, tant son cinéma a toujours été relativement schématique sans que cela n’ait jamais vraiment gêner jusqu’alors.
Si cette fois la recette ne fonctionne jamais, c’est parce que le cinéaste nous parait fatigué, a bout de souffle, incapable de se renouveler. Sa méthode est a bout de souffle. Ses histoires reposent toutes sur des concepts forts et lapidaires qu’il développe d’une manière que l’on soupçonne improvisée. Dream est né dans son imagination après qu’il se soit réveillé lui même de cauchemars qui le hantaient. Il en a fait un film, mais un film qui ne fonctionne pas, qui n’a pas vraiment d’âme, et dont la provocation gratuite dans le dernier quart d’heure n’aboutit à rien sinon à un cinglant constat d’échec. C’est un immense gâchis.
Benoît Thevenin
Filmographie de Kim Ki-duk :
1996 : Crocodile
1996 : Wild Animals
1998 : The Birdcage Inn
2000 : Real Fiction
2000 : L’Île
2001 : Adresse inconnue
2001 : Bad Guy
2002 : The Coast Guard
2003 : Printemps, été, automne, hiver… et printemps
2004 : Samaria
2005 : Locataires
2005 : L’Arc
2006 : Time
2007 : Souffle
2008 : Dream
J’ai vu une paire de Kim Ki-duk et celui-ci ne m’avait pas plu non plus. Comme vous le dites, on croirait voir une auto dérision…
— Woods