L’annulaire de Diane Bertrand (2005)

L’annulaire est un film bloquant, en ce sens qu’il fascine ou rend perplexe. En tous cas, L’annulaire est un film qui ne ressemble à pas grand-chose de connu. Diane Bertrand mélange fantastique et érotisme fétichiste dans cette histoire étrange, improbable, mystérieuse et, d’une certaine manière, effrayante.

Iris (Olga Kurylenko), jeune femme belle et fragile, suit un homme. Il s’enfonce dans les bois, elle le perd. Elle découvre une  demeure vaguement abandonnée. Il s’agit en fait d’un laboratoire. Un homme y réalise des spécimens, c’est-à-dire qu’il recueil des fragments de vie pour lequel le client voue un culte fétiche.

Ce personnage (joué par Marc Barbé), sorte de taxidermiste, apparaît trouble. Diane Bertrand capte ainsi une ambiance malsaine, étouffante  et où passion et horreur s’entrechoquent dans cette relation entre lui et sa secrétaire.

Dans cette demeure, deux vieilles femmes hantent les lieux, un enfant épie la jeune femme. Elle apprend que d’autres jeunes filles l’ont précédé. Elles ont disparu du jour au lendemain. On ne les a plus revu.

La question du fétichisme est centrale au film. Déjà, du fait de cette allusion aux spécimens, mais aussi parce que le personnage joué par Marc Barbé va offrir une paire d’escarpins à Iris. Il y a tout un jeu érotique qui se met en place par rapport à ce cadeau. Il y a cette très belle scène où Marc Barbé fait enfiler les pieds d’Olga Kurylenko dans cette paire, dans un acte d’une douceur et d’une volupté euphorisante. La scène dans un ancien hammam est très belle. Une vraie tension se dégage de cet enferment mais cela va au-delà. On se laisse prendre au jeu sensuel auxquels les personnages se livrent. En tous les cas, c’est vers cette paire de chaussure que convergent toute l’attention et toute la tension (érotique) du film. Mais c’est aussi à travers elle que s’incarne et se matérialise la relation dissonante entre les deux personnages principaux.

Le discours du vieil africain (Sotigui Kouyate) sur ces chaussures, le fait qu’elles « possèdent » celle qui les porte etc., ajoute un degré fantastique supplémentaire à cette histoire pour le moins emplie de mystères. Cela coïncide donc parfaitement avec l’atmosphère étrange et inquiétante  présente d’un bout à l’autre du film.

Ces escarpins symbolisent l’emprise de cet homme sur sa secrétaire. Oui, elle est possédée. Elle est soumise aussi. La séquence du Mah-jong témoigne de cette tonalité sadomasochiste sous-jacente.

Parallèlement à cette histoire, il y a cette double liaison, tout autant distante, avec un marin qui partage sa chambre d’hôtel. Ils se croisent mais ne se rencontre jamais. Lui choisit les robes qu’il aimerait la voir porter lorsque depuis son bateau il la voit sur le quai. Ils ne se voient donc pas mais communiquent. Le désir est palpable, la passion aussi. Tout cela est paradoxal certes. Cette relation impossible contrebalance celle que la jeune femme a avec  le taxidermiste. Le marin, d’un certaine manière, permet à Iris de ce libérer de l’emprise de cet autre homme, il le transporte vers un ailleurs, un autre lieu que le laboratoire de ces fantasmes.
Peu à peu, elle s’enferme dans sa relation étouffante avec le taxidermiste. Elle tombe dans son piège, comme les autres jeunes femmes passées par là, et envoûtées, condamnées par une sorte de sortilège. L’annulaire fascine, dérange, déconcerte mais ne laisse pas indifférent.

Benoît Thevenin


L’Annulaire – Note pour ce film :

Sortie française  le 8 juin 2005


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